505179
Résumé
En bref
Le Conseil d’État, juge des référés (ordonnance du 4 juillet 2025, n° 505179) a partiellement suspendu, sur le fondement de l’article L. 521-1 du Code de justice administrative, l’exécution de la décision de la Commission des sanctions de l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) du 28 avril 2025, qui interdisait à un joueur de rugby toute activité sportive pendant 18 mois. La suspension est effective à compter du 28 octobre 2025, la sanction étant jugée potentiellement disproportionnée au regard de la carrière du requérant. L’AFLD est condamnée à verser 1 500 € au titre de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative.
En détail
Parties en cause
- Requérant : M. B A, joueur de rugby sanctionné par la Commission des sanctions de l’AFLD.
- Défenderesse : Agence française de lutte contre le dopage (AFLD).
Problématique et question juridique principale
La question centrale porte sur la légalité et la proportionnalité de la sanction disciplinaire d’interdiction d’activité sportive prononcée par l’AFLD à l’encontre du requérant, au regard notamment des garanties procédurales, de la qualification de la faute et de la situation professionnelle du sportif.
Exposé du litige, faits et arguments
À la suite d’un contrôle antidopage le 26 août 2023, la présence de prednisone et prednisolone (glucocorticoïdes interdits) est détectée chez M. A, sans autorisation d’usage à des fins thérapeutiques (AUT). La Commission des sanctions de l’AFLD prononce une interdiction de 18 mois de toute activité sportive. M. A saisit le Conseil d’État en référé, invoquant l’urgence (atteinte à sa carrière, réputation, impossibilité de signer un contrat), des irrégularités procédurales (information tardive sur le droit de se taire), l’absence de faute significative, la disproportion de la sanction et une erreur sur son statut professionnel.
Plan et motivations de la décision
- Sur la procédure : Le Conseil d’État écarte le moyen tiré de l’absence d’information préalable sur le droit de se taire lors de l’enquête, estimant qu’aucune irrégularité substantielle n’est caractérisée à ce stade, la notification étant intervenue avant l’audience disciplinaire.
- Sur la qualification de la faute : Il est retenu que la présence de substances interdites dans l’organisme du sportif, sans AUT, constitue en soi une violation de l’article L. 232-9 du Code du sport. La commission a estimé que la faute n’était pas significative, justifiant une sanction inférieure au maximum légal (18 mois au lieu de 2 ans).
- Sur la proportionnalité de la sanction et la situation individuelle : Le Conseil d’État relève que la sanction, bien que modulée, risque d’empêcher la poursuite de la carrière du joueur sur deux saisons, eu égard à son âge et à la brièveté de sa carrière passée. Ce risque de préjudice irréversible justifie la suspension partielle de la décision de l’AFLD à compter du 28 octobre 2025, notamment pour permettre la reprise de l’entraînement dès le 28 août 2025.
Extrait de la décision :
« Le prononcé, le 28 avril 2025, d'une interdiction de 18 mois risque, de fait, eu égard au calendrier de recrutement des joueurs, d'interdire la poursuite de la carrière de l'intéressé sur deux saisons consécutives, et eu égard à son âge et à la brièveté de sa carrière passée, de compromettre celle-ci de façon définitive. Par suite, le moyen tiré de ce que la commission des sanctions aurait ainsi prononcé une sanction disproportionnée en tant qu'elle excède une durée de six mois est de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée. »
Points de droit et répercussions
- Contrôle de la proportionnalité des sanctions disciplinaires par le juge administratif, en particulier sur les conséquences professionnelles pour les sportifs.
- Précision sur la portée des garanties procédurales lors des enquêtes antidopage.
- Application de l’article L. 521-1 du Code de justice administrative pour la suspension partielle d’une sanction administrative.
- Possibilité de réduction de la durée d’exécution d’une sanction en référé en cas de doute sérieux sur sa légalité et d’urgence caractérisée.
Mots clés
Conseil d’État, juge des référés, dopage, proportionnalité de la sanction, urgence, article L. 521-1 du Code de justice administrative, article L. 232-9 du Code du sport, garanties procédurales, suspension partielle, carrière sportive