504976
Résumé
En bref
Le Conseil d'État, statuant en référé le 19 juin 2025, a rejeté la demande de suspension de l'exécution d'une sanction de deux ans d'interdiction de compétition prononcée par la Commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage à l'encontre d'un sportif professionnel.
La Haute juridiction, sur le fondement de l'article L. 521-1 du Code de justice administrative, a jugé qu'aucun des moyens invoqués, notamment relatifs à la charge de la preuve et à la proportionnalité de la sanction, n'était de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée. La requête est donc rejetée.
En détail
Parties impliquées et contexte
Le requérant, M. B... A..., joueur professionnel, a saisi le Conseil d’État en référé afin de suspendre l’exécution de la décision du 31 mars 2025 de la Commission des sanctions de l’Agence française de lutte contre le dopage. Cette décision lui inflige une sanction de deux ans d’interdiction de toute activité sportive organisée ou autorisée par une fédération, une ligue professionnelle ou une organisation signataire du code mondial antidopage, à la suite d’un contrôle antidopage positif réalisé le 21 mai 2023.
Problèmes juridiques en jeu
La question centrale portait sur la légalité de la sanction disciplinaire, notamment au regard des règles de procédure, des droits de la défense, de la charge de la preuve de l’origine de la substance interdite, de l’application du principe de prépondérance des probabilités et de la proportionnalité de la sanction au regard du régime applicable aux substances d’abus.
Arguments des parties
Le requérant soutenait que :
- La décision contestée violait les droits de la défense (éléments non communiqués, irrégularité de la convocation des membres de la commission).
- La charge de la preuve de l’origine de la substance ne devait pas peser sur lui.
- La commission n’avait pas appliqué le principe de prépondérance des probabilités (article 6 de la délibération du collège de l’Agence du 27 mai 2021).
- La sanction était disproportionnée, notamment en l’absence de mobile sportif et au vu de son profil, des données médicales et témoignages produits.
Plan et motivation de la décision
Le Conseil d’État a rappelé le cadre juridique applicable :
- Article L. 521-1 du Code de justice administrative : le juge des référés ne peut suspendre l’exécution d’une décision administrative que si l’urgence le justifie et s’il existe un moyen propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision.
- Articles L. 232-9, L. 232-23, L. 232-23-3-3 et L. 232-23-3-10 du Code du sport : ces dispositions organisent le régime de la responsabilité objective du sportif en matière de dopage, la charge de la preuve pour bénéficier d’une exonération ou réduction de sanction, et la proportionnalité des mesures.
Motivations détaillées
- Sur la charge de la preuve
- Sur les droits de la défense et la procédure
- Sur la proportionnalité de la sanction
Le Conseil d'État a jugé que, conformément à l'article L. 232-9 du Code du sport, il incombe au sportif de démontrer de quelle manière la substance interdite est entrée dans son organisme et qu'il n'a pas commis de faute ou de négligence, sauf exceptions prévues pour certains profils de sportifs. Cette charge de la preuve conditionne l'accès à une exonération ou à une réduction de sanction selon l'article L. 232-23-3-10.
Extrait de la décision :
« il lui incombait d’établir, d’une part, de quelle manière la substance interdite a pénétré dans son organisme et, d’autre part, qu’il ignorait, ne soupçonnait pas, ou n’aurait pas pu raisonnablement savoir ou soupçonner, même en faisant preuve de la plus grande vigilance, qu’il s’était fait administrer une substance interdite. »
Le Conseil d’État a estimé que les moyens tirés de l’irrégularité de la convocation, de la méconnaissance des droits de la défense et de l’absence de communication de certains éléments n’étaient pas de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision, au regard de la procédure suivie et des garanties offertes par le Code du sport et le Code de justice administrative.
La Haute juridiction a rappelé que la durée de la sanction était conforme aux prescriptions de l'article L. 232-23-3-3 du Code du sport, la réduction n'étant possible que si le sportif établit l'absence de faute ou de négligence significative, ce qui n'était pas le cas en l'espèce. La commission n'a donc pas commis d'erreur de droit en écartant l'hypothèse d'une contamination alimentaire accidentelle, faute d'éléments probants produits par le requérant.
Points de droit et répercussions
- Confirmation du principe de responsabilité objective du sportif en matière de dopage, la charge de la preuve pesant sur le sportif pour toute exonération ou réduction de sanction.
- Rappel du caractère strict des conditions d’accès à la réduction de sanction, qui suppose une démonstration précise et circonstanciée de l’absence de faute ou de négligence.
Mots clés
dopage, responsabilité objective, charge de la preuve, suspension, référé, proportionnalité, droits de la défense, faute ou négligence, sanction disciplinaire, code du sport