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Résumé
En bref
Le Conseil d’État rejette la requête du syndicat UNIPROS, qui contestait l’assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) des redevances versées aux sportifs et entraîneurs professionnels en vertu des contrats d’exploitation commerciale de leur image, nom ou voix, tels que prévus par l'article L. 222-2-10-1 du Code du sport. Le Conseil a jugé que ces redevances, perçues de manière indépendante et sans lien de subordination, constituent des prestations de services entrant dans le champ d’application de la TVA, conformément à l’article 256 du Code général des impôts et à la directive 2006/112/CE. La requête d’interroger la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) à titre préjudiciel a également été rejetée, en l'absence de doute sérieux sur l'interprétation des textes.
Décision finale : La requête d’UNIPROS est rejetée, les redevances restent soumises à la TVA.
En détail
1. Parties impliquées
- Demandeur : Syndicat Union des clubs professionnels (UNIPROS), représentant des intérêts collectifs des clubs professionnels.
- Défendeur : Directeur de la législation fiscale (administration fiscale française).
2. Problématique juridique
La question principale portait sur l’assujettissement à la TVA des redevances payées aux sportifs et entraîneurs professionnels dans le cadre de contrats d’exploitation commerciale de leur image, nom ou voix.
3. Question juridique principale
Ces redevances doivent-elles être soumises à la TVA au regard des dispositions du Code du sport, du Code général des impôts (CGI) et de la directive 2006/112/CE sur la TVA ?
4. Faits et litige
Le syndicat UNIPROS contestait le courrier du 23 novembre 2021, dans lequel l’administration fiscale avait confirmé que les redevances versées au titre des contrats de concession d’exploitation commerciale de l’image, nom ou voix des sportifs étaient soumises à la TVA. Le syndicat soutenait que ces redevances, relevant d’un lien contractuel avec l’entité sportive, ne constituaient pas une activité exercée de manière indépendante.
Le litige a été transmis par le tribunal administratif de Paris au Conseil d’État, qui devait statuer sur la légalité de cette position administrative.
5. Analyse juridique et motivations de la décision
A. Qualification des redevances en tant que prestations de services
Sur le fondement de l’article 256 IV 1° du Code général des impôts, les redevances versées pour la concession de l’exploitation de biens incorporels (image, nom, voix) sont assimilées à des prestations de services soumises à la TVA. Pour être assujetties, ces prestations doivent être réalisées par un assujetti agissant de manière indépendante, conformément à l’article 256 A du CGI, transposant l’article 9 de la directive 2006/112/CE.
B. Indépendance et absence de lien de subordination
Le Conseil a analysé les dispositions de l’article L. 222-2-10-1 du Code du sport, qui exclut que les redevances soient considérées comme accessoires au contrat de travail, dans la mesure où :
- Le sportif ou l’entraîneur n’est pas tenu à un lien de subordination dans l’exécution de l’exploitation commerciale.
- La rémunération (redevances) est variable et dépend des revenus générés par l’exploitation, et non d’un salaire fixe.
Ces éléments démontrent que l’activité est exercée de manière indépendante, comme l’a également précisé la CJUE (arrêts Gmina Wroclaw, C-276/14, et Heerma, C-23/98).
C. Refus de saisine préjudicielle de la CJUE
Le Conseil d’État a estimé qu’il n’existait aucun doute sérieux justifiant une demande d’interprétation à la CJUE, les textes et jurisprudences européennes étant suffisamment clairs.
6. Extrait de la décision
« Dès lors que l’opération de concession de l’exploitation de biens incorporels constitue une activité économique entrant dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée (...), et que les sportifs et entraîneurs percevant les redevances litigieuses exercent de manière indépendante, (...) l’activité à raison de laquelle elles sont versées, le directeur de la législation fiscale n’a pas méconnu les dispositions (...). »
7. Répercussions juridiques
- Confirmation que les redevances en question sont soumises à la TVA.
- Encadrement des relations contractuelles liées à l’exploitation commerciale de l’image des sportifs.
- Renforcement de l’autonomie juridique des contrats d’image par rapport aux contrats de travail.
Mots clés
Droits à l’image, redevances, TVA, activité économique indépendante, contrat d’image, directive 2006/112/CE, Code du sport, Code général des impôts, Conseil d’État, subordination juridique.