24/01181
Résumé
En bref
La Cour d'appel de Reims, infirmant un jugement de première instance, rejette la demande de requalification d'une convention de partenariat en contrat de travail liant un joueur de basket à son club. Se fondant sur l'analyse factuelle des conditions d'exercice de l'activité, la Cour juge que deux des trois critères cumulatifs du contrat de travail font défaut. ❌ D'une part, le lien de subordination n'est pas caractérisé, les obligations du joueur (présence aux entraînements et matchs) découlant du règlement intérieur applicable à tous les membres et des contraintes inhérentes à un sport collectif, et non d'un pouvoir de direction de l'employeur. ❌ D'autre part, la rémunération n'est pas établie, les sommes versées correspondant à des remboursements de frais kilométriques et à des indemnités de représentation, et non à un salaire en contrepartie d'une prestation de travail. ✅ La Cour déboute en conséquence le joueur de l'intégralité de ses demandes.
En détail
1. CADRE DE L'AFFAIRE
- Parties impliquées : L'association sportive LA GAULOISE DE [Localité 6] (appelante) et Monsieur [H] [K], joueur de basket (intimé).
- Problèmes juridiques principaux : La qualification juridique de la relation contractuelle entre un joueur et un club de basket amateur évoluant en National 3. La distinction entre une relation de type salariale et un engagement associatif indemnisé.
- Question juridique principale : La "convention de partenariat joueur-club" signée par les parties doit-elle être requalifiée en contrat de travail à durée indéterminée au regard des conditions de fait dans lesquelles le joueur a exercé son activité ?
- Exposé du litige : Monsieur [H] [K] a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la requalification de ses conventions de partenariat successives avec le club en contrat de travail. Il soutenait que les trois éléments constitutifs du salariat (prestation de travail, rémunération, lien de subordination) étaient réunis. ❌ Le club s'y opposait, arguant de l'absence de lien de subordination et du caractère indemnitaire et non salarial des sommes versées, le joueur étant un simple adhérent licencié. ✅ Le Conseil de prud'hommes avait initialement donné raison au joueur. L'association a interjeté appel de cette décision.
2. ANALYSE DES MOTIFS
La Cour d'appel, pour infirmer le jugement, procède à une analyse méthodique des trois critères cumulatifs du contrat de travail : la prestation de travail, la rémunération et le lien de subordination. Si elle admet que la pratique du basket-ball peut constituer une prestation de travail, elle conclut à l'absence des deux autres éléments essentiels. 🔍 La Cour rappelle en préambule le principe fondamental selon lequel l'existence d'une relation de travail salarié ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité professionnelle.
A. Sur l'absence de lien de subordination juridique
La Cour examine en premier lieu le critère déterminant du lien de subordination, défini comme l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements. Elle constate que les obligations imposées à Monsieur [H] [K] ne relèvent pas d'un tel pouvoir de direction. Sur le fondement de l'appréciation souveraine des faits, la Cour établit que les contraintes pesant sur le joueur (assiduité aux entraînements, participation aux matchs, obligation de prévenir en cas d'absence) ne sont pas la manifestation d'une subordination à un employeur. Elles sont en réalité inhérentes à la pratique d'un sport collectif et découlent du règlement intérieur du club, qui s'applique de la même manière à tous les licenciés, y compris les plus jeunes. ➡️ Ces règles visent à assurer le bon fonctionnement de l'association et des équipes, et non à encadrer l'exécution d'une prestation de travail.
"Les obligations qui s'imposaient à Monsieur [H] [K] dans le cadre de la convention de partenariat sont essentiellement issues du règlement intérieur, lui-même applicable aux enfants à partir de sept ans qui se voient imposer la même assiduité et la même obligation de participer aux matchs et de prévenir en cas d'absence, et ce pour respecter le fonctionnement du club et son objet même qui consiste à permettre à des équipes de jouer au basket, ce qui implique que les joueurs soient présents, s'agissant d'un sport collectif." (Décision, p. 8)
Cette analyse permet à la Cour de distinguer les contraintes fonctionnelles liées à une activité sportive associative des directives et du contrôle caractéristiques de l'autorité patronale. De plus, la Cour relève que le club n'exerçait pas de réel pouvoir disciplinaire. S'agissant des éventuelles déductions financières pour fautes techniques ou disciplinaires, elle précise qu'il ne s'agit pas d'un pouvoir de sanction de l'employeur mais de la simple application des règles édictées par les fédérations sportives.
"Toutefois il ne s'agit pas d'un pouvoir de sanction de l'employeur mais de l'application des règles disciplinaire prévues par les fédérations sportives agréées conformément aux dispositions du code du sport." (Décision, p. 9)
Par conséquent, l'élément essentiel du lien de subordination fait défaut.
B. Sur l'absence de rémunération à caractère salarial
La Cour se penche ensuite sur la nature des sommes versées au joueur, pour déterminer si elles constituaient un salaire en contrepartie du travail fourni. ⚖️ Elle conclut par la négative en se fondant sur l'analyse des justificatifs produits. La Cour constate que les paiements mensuels correspondaient à des remboursements de frais kilométriques, dont le montant variait chaque mois en fonction des déplacements réellement effectués. ➡️ Le fait que le joueur ait pratiqué le covoiturage est jugé insuffisant pour remettre en cause la nature indemnitaire de ces versements. Concernant la "prime de représentation" de 126 euros, la Cour écarte la qualification de prime de match. Elle retient qu'il s'agissait d'une indemnité versée au joueur pour sa participation à la promotion du club auprès de ses sponsors, en raison de son appartenance à l'équipe "fanion", qualifiée de "prestigieuse".
"Enfin la prime de représentation de 126 euros n'était pas une prime de match, contrairement à ce que soutient Monsieur [H] [K] mais une indemnité de représentation dans le cadre de la mise en valeur et de la promotion du club auprès des sponsors, l'intimé jouant dans une équipe prestigieuse de club." (Décision, p. 9)
Il résulte de ces éléments que l'indemnisation perçue par Monsieur [H] [K] n'avait pas le caractère d'un salaire. L'absence de ce deuxième critère cumulatif conforte le rejet de la demande de requalification.
3. EXTRAIT PRINCIPAL DE LA DÉCISION
Extrait principal de la décision : "Les obligations qui s'imposaient à Monsieur [H] [K] dans le cadre de la convention de partenariat sont essentiellement issues du règlement intérieur, lui-même applicable aux enfants à partir de sept ans qui se voient imposer la même assiduité et la même obligation de participer aux matchs et de prévenir en cas d'absence, et ce pour respecter le fonctionnement du club et son objet même qui consiste à permettre à des équipes de jouer au basket, ce qui implique que les joueurs soient présents, s'agissant d'un sport collectif." (Décision, p. 8)
4. POINTS DE DROIT
- 🎯 Qualification du lien de subordination : Les obligations imposées à un joueur (assiduité, participation) qui découlent d'un règlement intérieur applicable à tous les membres et des contraintes inhérentes à la pratique d'un sport collectif ne suffisent pas à caractériser un lien de subordination juridique.
- 🔗 Nature de la rémunération : Des versements correspondant à des remboursements de frais kilométriques variables et à des indemnités de représentation pour des actions promotionnelles ne constituent pas un salaire, critère indispensable à la reconnaissance d'un contrat de travail.
- ⚖️ Distinction du pouvoir de sanction : L'application de sanctions financières prévues par les règlements d'une fédération sportive (par exemple pour fautes techniques) ne s'analyse pas comme l'exercice du pouvoir disciplinaire de l'employeur.
- 👨⚖️ Appréciation factuelle : La qualification d'une relation contractuelle relève de l'appréciation souveraine des juges du fond, qui doivent rechercher, au-delà de la dénomination de l'acte, la réalité des conditions de fait de l'exercice de l'activité pour déterminer l'existence ou non d'un salariat.
Mots clés
Requalification de contrat, contrat de travail, lien de subordination, rémunération, prestation de travail, joueur amateur, club sportif, convention de partenariat, règlement intérieur, pouvoir de sanction.
NB : 🤖 résumé généré par IA