C-365/23
Résumé
En bref
Le 20 mars 2025, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a rendu une décision concernant un contrat de services de soutien au développement sportif et à la carrière conclu entre un professionnel et un jeune sportif mineur. La CJUE a considéré que ce type de contrat relève du champ d'application de la directive 93/13/CEE sur les clauses abusives présentes dans les contrats conclus avec les consommateurs. Elle a précisé que la clause prévoyant une rémunération de 10% des revenus futurs du sportif sur 15 ans peut être soumise à un contrôle juridictionnel, même si elle est rédigée de façon claire et compréhensible, sous réserve que la réglementation nationale prévoit un tel contrôle. La CJUE a également rappelé que l'intérêt supérieur de l'enfant devait être pris en compte dans l'appréciation du caractère abusif de telles clauses, conformément à l'article 24 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.
En détail
Parties impliquées
SIA "A" c/ C, un joueur de basket-ball, ainsi que ses parents D et E.
Problèmes juridiques
- Un contrat conclu entre un professionnel et un sportif mineur, non encore professionnel au jour de la conclusion du contrat, relève-t-il du champ d'application de la directive 93/13/CEE relative aux clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs ?
- A quelles conditions le caractère abusif d'une clause prévoyant une rémunération de 10% des revenus futurs du sportif peut-il être apprécié par une juridiction nationale ?
Exposé du litige
Le litige concerne un contrat conclu le 14 janvier 2009 entre SIA "A" et C, alors âgé de 17 ans, représenté par ses parents. Ce contrat prévoyait divers services pour soutenir le développement sportif et la carrière de C, en échange d'une rémunération égale à 10% de ses revenus nets pendant quinze ans, sous condition de revenus mensuels supérieurs à 1500 euros.
Motifs de la décision
- Applicabilité de la directive 93/13/CEE :
- Sur le fondement de l'article 1er, paragraphe 1, et de l'article 2, sous b), de la directive, la CJUE a jugé qu'un tel contrat relève bien du champ d'application de la directive. La qualité de consommateur s'apprécie au moment de la conclusion du contrat, et le fait que le sportif devienne professionnel par la suite n'a pas d'incidence sur cette qualification.
- Appréciation du caractère abusif de la clause de rémunération :
- Sur le fondement de l'article 4, paragraphe 2, de la directive, une clause rédigée de façon claire et compréhensible ne peut normalement pas être appréciée pour son caractère abusif. Cependant, les États membres peuvent adopter des dispositions plus strictes permettant un contrôle juridictionnel même dans ce cas.
- La Cour précise que pour que la rédaction d'une clause soit considérée comme claire et compréhensible, celle-ci doit permettre au consommateur d'évaluer les conséquences économiques de son engagement. Elle en déduit que les informations nécessaires pour permettre au consommateur d'évaluer les conséquences économiques de son engagement doivent lui être communiquées avant la conclusion du contrat.
- La Cour indique également que l'appréciation du déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties doit tenir compte de divers éléments, notamment les règles nationales applicables et les pratiques de marché loyales et équitables.
- Enfin, la Cour rappelle qu'une juridiction nationale ne peut pas réduire le montant dû par le consommateur à hauteur des frais effectivement supportés par le prestataire si elle constate le caractère abusif d'une clause.
- Prise en compte de la minorité du consommateur :
- Conformément à l'article 24 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et afin de prendre en compte l'intérêt supérieur de l'enfant, la CJUE a précisé que la circonstance que le consommateur était mineur lors de la conclusion du contrat et que ce dernier a été conclu par ses parents en son nom est pertinente pour apprécier le caractère abusif de la clause.
Extrait de la décision
“Un contrat de services de soutien au développement et à la carrière d'un sportif, conclu entre, d'une part, un professionnel exerçant une activité dans le domaine du développement des sportifs et, d'autre part, un mineur « espoir », représenté par ses parents, qui, lors de la conclusion de ce contrat, n'était pas encore employé dans le domaine du sport et, partant, avait la qualité de consommateur, relève du champ d'application de cette directive.”
Points de droit importants
- Application de la directive 93/13/CEE : Les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, y compris dans le domaine du sport, peuvent relever de cette directive si les conditions sont remplies.
- Clause abusive : Une clause est abusive si elle crée un déséquilibre significatif sans avoir été négociée individuellement.
- Intérêt supérieur de l'enfant : La Charte des droits fondamentaux exige que l'intérêt supérieur de l'enfant soit pris en compte dans l'appréciation du caractère abusif des clauses.
Mots clés
Directive 93/13/CEE, clauses abusives, contrat de services sportifs, consommateur mineur, déséquilibre significatif, intérêt supérieur de l'enfant, Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, rémunération proportionnelle, transparence contractuelle, protection des consommateurs.