n°488100
Résumé
En bref
Le Conseil d'État, par décision du 6 juin 2025 (n° 488100), a jugé que la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, en se fondant principalement sur l’article 432-13 du Code pénal et les articles L. 124-4 et L. 124-12 du Code général de la fonction publique, n’a pas commis d’erreur de droit en rendant un avis d’incompatibilité à l’égard du projet de reconversion professionnelle d’un fonctionnaire de police vers le FC Nantes. La décision de la Haute Autorité est donc légale et la requête de l’intéressé est rejetée.
En détail
L’affaire oppose M. B... A..., brigadier-chef de police, à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique ("HATVP"). M. A... sollicitait l’annulation, pour excès de pouvoir, d’une délibération de la HATVP du 11 juillet 2023 émettant un avis d’incompatibilité concernant son projet de rejoindre la société anonyme sportive professionnelle Football Club de Nantes (FC Nantes) en qualité de directeur sûreté et sécurité, après mise en disponibilité. Le principal enjeu juridique était de savoir si la HATVP avait pu, sans commettre d’erreur de droit, estimer que le projet exposait M. A... au risque de prise illégale d’intérêts au sens de l’article 432-13 du Code pénal, notamment au regard de ses anciennes fonctions liées à la sécurité et à la surveillance des activités du FC Nantes. Au fond, les faits révèlent que M. A..., dans ses fonctions de référent hooliganisme, évaluait les risques liés à l’ordre public lors de matches du FC Nantes et proposait des mesures d’encadrement susceptibles d’influer sur les conventions conclues entre l’État et ce club pour les remboursements des dépenses de sécurité. La HATVP, saisie après avis défavorable du préfet, estimait qu'occuper un poste de direction sécurité dans cette même entité présentait un risque de conflit d’intérêts et d’infraction potentielle à l’article 432-13 susmentionné. S’agissant de la légalité externe, le Conseil d'État relève, sur le fondement des articles L. 124-10 à L. 124-15 du Code général de la fonction publique, que la HATVP a suffisamment motivé sa décision, respecté les règles de procédure interne, informé l’intéressé et que l’absence de procédure contradictoire préalable n’est pas en elle-même un grief fondé en matière d’avis rendu sur la base de l’article L. 124-10. De surcroît, il n’y a pas méconnaissance de l’article 6§1 de la Convention EDH au vu des circonstances procédurales de l’espèce. En matière de légalité interne, le Conseil d'État énonce que la HATVP dispose légalement du pouvoir d’apprécier le "risque" de commission d’une infraction sur le fondement de l’article L. 124-12 du Code général de la fonction publique et non pas de constater la réalisation de ses éléments constitutifs. En l’espèce, l’analyse précise des missions confiées à M. A... justifiait la crainte que l’intéressé puisse se placer dans une situation prohibée par l’article 432-13 du Code pénal, la Haute Autorité n’ayant pas édicté d’interdiction générale mais motivé en fait et en droit. Le Conseil précise que ce risque n’est pas sérieusement contesté quant aux activités effectivement exercées par M. A... au cours des trois années précédant la mobilité, conformément à l’article 432-13.
Extrait de la décision : “(…) il appartient à la Haute Autorité, non d’examiner si les éléments constitutifs de ces infractions sont effectivement réunis, mais d’apprécier le risque qu’ils puissent l’être et de se prononcer de telle sorte qu’il soit évité à l’intéressé comme à l’administration d’être mis en cause".
Le Conseil d'État valide donc le raisonnement de la HATVP, consacre une interprétation rigoureuse du mécanisme de prévention des conflits d’intérêts à la lumière des règles pénales et de la déontologie administrative, et rappelle le caractère impératif des avis négatifs rendus en application des articles L. 124-14 et L. 124-15. Point de droit important : La décision confirme la portée du contrôle exercé par la Haute Autorité dans la prévention des conflits d’intérêts dans le champ sportif et la portée immédiate et impérative de ses avis d’incompatibilité, y compris pour les mouvements de personnel vers des sociétés sportives privées.
Mots clés
prise illégale d’intérêts, conflit d’intérêts, Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, mobilité fonction publique, FC Nantes, prévention pénale, référent hooliganisme, article 432-13 du Code pénal, article L. 124-12 du Code général de la fonction publique, incompatibilité emploi sportif