24PA01258
Résumé
En bref
La Cour administrative d'appel de Paris, par arrêt du 11 juin 2025, a annulé la décision du 28 juin 2023 de la commission de recours de la Fédération tahitienne de football infligeant à l’AS Pirae Football la sanction d’un match perdu et son déclassement, au motif que le club n’avait commis aucune faute, la participation de joueurs prétendument suspendus résultant d’une erreur administrative imputable à la fédération. La Cour fonde sa décision sur l’interprétation combinée des articles 109, 110 et 118 des règlements généraux de la FTF, ainsi que sur le principe général de légalité des sanctions administratives. La FTF est condamnée à verser 2 000 euros à l’ASPF au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
En détail
Parties impliquées :
- Appelante : Association sportive Pirae Football (ASPF)
- Intimée : Fédération tahitienne de football (FTF)
- Autres parties : Comité olympique de la Polynésie française
Principaux problèmes juridiques :
- Légalité de la sanction sportive infligée à l’ASPF pour avoir aligné des joueurs prétendument suspendus
- Application rétroactive d’une modification réglementaire
- Respect des droits de la défense et impartialité des instances fédérales
Question juridique principale :
Un club peut-il être sanctionné pour avoir aligné des joueurs dont la suspension n’était pas portée à sa connaissance du fait d’une erreur administrative imputable à la fédération ?
Exposé du litige, faits et arguments :
Le 6 mai 2023, l'ASPF a aligné deux joueurs lors d'un match de Ligue 1 «Vini Play Off». La direction des compétitions de la FTF a, après coup, considéré que ces joueurs étaient suspendus pour accumulation de cartons jaunes, et a infligé au club la perte du match, modifiant le classement général. L'ASPF a contesté cette sanction, arguant qu'elle n'avait pas été informée de la suspension, le procès-verbal officiel mentionnant que les joueurs n'étaient pas suspendus, et que cette erreur résultait d'un dysfonctionnement du logiciel fédéral. Elle a également soulevé des griefs relatifs à la rétroactivité de la modification réglementaire et à l'impartialité des instances fédérales.
Plan et motivations de la décision :
1. Sur la recevabilité des conclusions
La Cour confirme l’irrecevabilité des conclusions dirigées contre la lettre du président du comité olympique et contre la modification réglementaire du 12 juin 2023, l’ASPF n’ayant pas contesté ces points en appel.
2. Sur la légalité de la sanction sportive
Sur le fondement des articles 109, 110 et 118 des règlements généraux de la FTF, la Cour rappelle qu’un club ne peut être sanctionné que s’il était en mesure de savoir qu’un joueur était suspendu. Or, le procès-verbal officiel adressé au club mentionnait que les joueurs concernés n’étaient pas suspendus, cette information erronée résultant d’une « erreur administrative » reconnue par la FTF elle-même. Aucun élément ne permettait au club de douter de l’exactitude de ce document, d’autant que le service de comptabilité de la FTF n’avait pas réclamé d’amende liée aux cartons jaunes litigieux. La Cour estime donc que l’ASPF n’a commis aucune faute.
3. Sur l’application du principe de légalité des sanctions
Sur le fondement du principe général de légalité des sanctions administratives, la Cour juge que la sanction infligée à l’ASPF est illégale dès lors que le club s’est borné à se conformer aux informations officielles fournies par la fédération, et qu’aucune négligence ne peut lui être reprochée.
Extrait de la décision :
« En l’absence de faute commise par l’ASPF, qui s’est bornée à tenir compte des renseignements qui lui étaient fournis, la sanction qui lui a été infligée est entachée d’illégalité. »
Points de droit importants et répercussions
- Affirmation du principe selon lequel un club ne peut être sanctionné pour des faits résultant d’une erreur administrative imputable à la fédération.
- Nécessité pour les fédérations sportives de garantir la fiabilité des informations transmises aux clubs.
- Rappel du caractère non rétroactif des actes réglementaires et du respect des droits de la défense dans les procédures disciplinaires sportives.
Mots clés
sanction sportive, erreur administrative, Fédération tahitienne de football, droits de la défense, impartialité, rétroactivité, légalité des sanctions, article 109 règlements FTF, article 110 règlements FTF, article L. 761-1 code de justice administrative