21/01773
Résumé
En bref
La Cour d'appel d'Aix-en-Provence, sur le fondement de l'article L.1611-4 du Code général des collectivités territoriales, constate l'illicéité des stipulations financières dans la convention de partenariat du 19 juillet 2012 entre deux associations sportives locales, dès lors qu'elles procèdent à un transfert de subventions contraire à la législation, en l'absence d'accord explicite de la collectivité. La cour infirme partiellement le jugement déféré en déboutant l'association Rugby club du pays [Localité 2] de toutes ses demandes en paiement et confirme le rejet de la demande indemnitaire et de l'abondement à la formation.
En détail
Identification des parties et problématique
Les parties à l'instance sont l'association Rugby club du pays [Localité 2] (RCPSF), appelante, et l'association Rugby club [Localité 2] le Brusc (RCSFLB), intimée. L'affaire porte sur la validité et l'exécution d'une convention de rassemblement du 19 juillet 2012, conclue pour deux saisons, ainsi que sur la licéité des flux financiers entre deux associations sportives subventionnées par la collectivité locale. La question juridique centrale réside dans la validité des stipulations financières organisant le versement d'une contribution du RCSFLB au RCPSF, au regard du principe d'interdiction du transfert des subventions entre associations établi par l'article L.1611-4 du Code général des collectivités territoriales.
Exposé du litige, faits et arguments
Après exécution partielle de la convention, le RCPSF a assigné le RCSFLB en paiement de diverses sommes fondées soit sur la convention (66 770 €), soit à titre de dommages et intérêts (30 000 €), soit au titre de l'abondement à la formation prévu par l'article 5 de la convention (32 000 €), ou, subsidiairement, au titre de l'enrichissement sans cause. Le RCPSF soutenait la validité de la convention, sa reconduction tacite, et une cause licite dans la répartition des prestations justifiées, tandis que le RCSFLB contestait toute somme, invoquant la nullité de la convention pour contrariété à l'ordre public, faute de reconduction et absence de justificatifs.
Analyse des motifs juridiques
- Sur la licéité de la convention et la demande principale de paiement Sur le fondement de l'article L.1611-4 du Code général des collectivités territoriales, la cour relève que la convention de 2012 prévoit, en substance, un mécanisme de retour d'une subvention par refacturation au bénéfice du RCPSF. Or, la jurisprudence et les pièces, dont les audits commandés par la commune et les protestations expresses du maire, démontrent que ce mécanisme constitue un transfert de subvention illicite, non prévu par la convention d'objectif passée entre la collectivité et l'organisme subventionné. Ainsi, l'accord de la collectivité étant explicitement exclu, la cour retient que « l'illicéité des stipulations financières… ne peut fonder la demande en paiement, quelle que soit la saison concernée, la reconduction d'un accord illégal ne pouvant être admise » (Sur le fondement de l'article L.1611-4 du Code général des collectivités territoriales).
- Sur les demandes accessoires et la preuve des frais Sur le fondement de l'article 1353 du Code civil, il appartenait au RCPSF d'établir la réalité des prestations et des fonds déboursés au profit du RCSFLB. Or, la cour constate que les justificatifs produits révèlent essentiellement des facturations forfaitaires ne reposant sur aucune dépense réelle ni sur la présentation des pièces initiales. En conséquence, la cour infirme la condamnation de 1 770 euros prononcée en première instance et déboute l'appelante de ses demandes principales et accessoires.
- Sur l'enrichissement sans cause La cour rappelle que cette action ne peut être intentée qu'à défaut de tout autre fondement (Sur le fondement de l'article 1303 du Code civil). Or, la demande tend aux mêmes fins que l'action principale. De plus, la cour constate que le RCPSF ne prouve aucun enrichissement effectif du RCSFLB corrélé à son propre appauvrissement, ni la réalité ou l'objet des frais avancés.
Extrait de la décision :
« Tout accord de l'autorité territoriale est donc exclu par ces écrits, de sorte qu'il convient de constater l'illicéité des stipulations financières prévues par la convention du 19 juillet 2012, laquelle ne peut donc fonder la demande en paiement, quelle que soit la saison concernée, la reconduction d'un accord illégal ne pouvant être admise. »
Points de droit et répercussions
La Cour d'appel d'Aix-en-Provence consacre l'applicabilité stricte de l'article L.1611-4 du Code général des collectivités territoriales dans le domaine sportif associatif et rejette toute tentative de validation postérieure par la poursuite de la relation contractuelle ou la prétendue reconduction tacite. Cette décision rappelle l'exigence de justification stricte pour toute dépense servant de fondement à une demande contre une association subventionnée.
En synthèse, la cour, en posant le principe de la stricte illégalité du transfert de subventions entre associations sportives en l'absence de disposition expresse validée par la collectivité, impose une vigilance accrue aux clubs subventionnés dans leur structuration financière et contractuelle.
Mots clés
Article L.1611-4 du Code général des collectivités territoriales, subvention, associations sportives, convention de partenariat, illicéité, transfert de subvention, preuve des dépenses, enrichissement sans cause, clause abusive, reconduction tacite