24/00868
Résumé
En bref
La Cour d'appel de Reims, dans un arrêt du 3 décembre 2024 (RG n° 24/00868), a partiellement infirmé une décision du juge de l'exécution concernant une saisie-attribution pratiquée par un joueur de football professionnel, M. [Y], à l'encontre de son ancien employeur, la SA Stade de [Localité 5]. La cour a validé la saisie pour un montant limité à 20.200 €, correspondant à des charges sociales indûment prélevées sur des dommages-intérêts pour préjudice professionnel.
Elle a ordonné la restitution des sommes perçues au-delà de ce montant et exigé l'établissement d'un bulletin de paie rectificatif.
La Cour a rejeté les demandes indemnitaires du club et réparti les dépens entre les parties.
En détail
Parties impliquées
- Appelant : SA Stade de [Localité 5],
- Intimé : M. [Y], ancien joueur professionnel,
Problèmes juridiques
- Validité et étendue d'une saisie-attribution pratiquée par M. [Y] pour obtenir le solde des sommes dues en exécution d'un arrêt antérieur.
- Détermination des obligations fiscales et sociales de l'employeur concernant les indemnités allouées.
- Responsabilité éventuelle du club pour des prélèvements jugés excessifs ou incorrects.
Question juridique principale
La saisie-attribution pratiquée par M. [Y] est-elle valide et, si oui, pour quel montant ?
Exposé du litige
M. [Y] avait obtenu, par un arrêt du 27 septembre 2023, diverses indemnités en réparation de préjudices liés à la rupture abusive de son contrat avec le Stade de [Localité 5]. Le club avait versé une partie des sommes mais avait appliqué des prélèvements fiscaux et sociaux contestés par le joueur. Estimant que le paiement était incomplet, M. [Y] avait procédé à une saisie-attribution pour le solde restant dû. Le juge de l'exécution avait validé partiellement cette saisie, ce que le club a contesté en appel.
Motifs de la décision
- Compétence du juge de l'exécution
Sur le fondement des articles L.121-1 et L.121-2 du Code des procédures civiles d'exécution, la Cour a confirmé que le juge de l'exécution était compétent pour examiner les difficultés liées aux prélèvements sociaux et fiscaux opérés sur les indemnités.
- Validité de la saisie-attribution
- Concernant les dommages-intérêts pour préjudice financier (174.825,44 €) : La Cour a estimé que le club avait correctement appliqué les charges sociales et un taux fiscal par défaut (43 %) conformément aux articles 204 H et 204 A du Code général des impôts.
- Concernant les dommages-intérêts pour préjudice professionnel (200.000 €) : La Cour a jugé que ces indemnités ne pouvaient être soumises aux charges sociales (CSG-CRDS) car elles visaient à réparer un préjudice distinct du contrat de travail, conformément au bulletin officiel de sécurité sociale.
- Obligations fiscales et sociales
La Cour a rappelé qu'en l'absence de communication d'un taux fiscal personnalisé par l'administration fiscale, l'employeur devait appliquer un taux par défaut, ce qui libère sa responsabilité fiscale vis-à-vis du salarié.
- Rectification des bulletins de paie
La Cour a ordonné au club d'établir un bulletin rectificatif distinguant clairement les postes indemnitaires et les prélèvements effectués.
- Dommages-intérêts réclamés par le club
La demande indemnitaire du club pour saisie abusive a été rejetée, faute de preuve d'un préjudice spécifique.
Extrait de la décision
« Dès lors que le taux d'imposition du salarié n'a pas été communiqué par l'administration fiscale, l'employeur ne peut appliquer un autre taux que ce taux par défaut [...]. Le paiement effectué entre les mains du Trésor Public est libératoire ».
Répercussions juridiques
- Clarification sur l'application des prélèvements fiscaux et sociaux aux indemnités allouées dans un cadre contractuel ou extra-contractuel.
- Confirmation que seule une faute manifeste dans l'exécution des obligations fiscales peut engager la responsabilité civile d'un employeur.
Mots clés
Saisie-attribution, dommages-intérêts, charges sociales, prélèvement à la source, taux fiscal par défaut, compétence du juge de l’exécution, rupture abusive, bulletin rectificatif, code général des impôts, CSG-CRDS