24/00171
Résumé
En bref
La Cour d'appel de Toulouse, dans son ordonnance de référé du 7 février 2025, a rejeté la demande d'arrêt d'exécution provisoire formée par la SA Fidelidade Companhia de Seguros contre un jugement la condamnant à verser 105 840 euros à un joueur de rugby au titre d'une garantie "perte de licence". Sur le fondement de l'article 514-3 du Code de procédure civile, la Cour a estimé que l'assureur n'avait pas démontré que l'exécution provisoire entraînerait pour lui des conséquences manifestement excessives, condition nécessaire pour arrêter l'exécution provisoire. La Cour a également rejeté les demandes subsidiaires de consignation ou de constitution de garantie, considérant que le défendeur disposait d'un patrimoine immobilier suffisant pour garantir une éventuelle restitution.
En détail
Parties impliquées
- Demanderesse : SA Fidelidade Companhia de Seguros, représentée par Me Sophien Ben Zaied.
- Défendeur : M. [J] [U], ancien joueur salarié de la SASP [Localité 4] Olympique Pays Basque, représenté par Me Louis-Marie Schmit.
Contexte et faits
M. [J] [U], bénéficiaire d'une garantie "perte de licence" souscrite par son club auprès de la SA Fidelidade, a obtenu en première instance une condamnation contre cette dernière pour un montant total de 105 840 euros, avec intérêts et frais. La SA Fidelidade a interjeté appel et saisi en référé la première présidente de la Cour d'appel pour obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire ou, à défaut, un aménagement sous forme de consignation ou garantie.
Problèmes juridiques
- Arrêt de l'exécution provisoire : La SA Fidelidade invoquait des « conséquences manifestement excessives » en cas d'exécution provisoire.
- Aménagements alternatifs : La compagnie demandait subsidiairement la consignation des sommes ou la constitution d'une garantie.
Question juridique principale
La question centrale était de savoir si les conditions cumulatives prévues à l'article 514-3 du Code de procédure civile étaient réunies pour justifier l'arrêt ou l'aménagement de l'exécution provisoire.
Raisonnement juridique
Sur l'arrêt de l'exécution provisoire
La Cour rappelle que, selon l'article 514-3 du Code de procédure civile, deux conditions cumulatives doivent être remplies :
- L'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou réformation en appel.
- Des conséquences manifestement excessives pour le débiteur.
La SA Fidelidade arguait un risque hypothétique de non-restitution des sommes en cas d'infirmation en appel. Cependant, elle n'a pas établi que ce risque entraînerait des conséquences excédant les risques normaux liés à une exécution provisoire. La Cour souligne que « l'importance des condamnations ne saurait à elle seule caractériser » ces conséquences manifestement excessives.
Extrait de la décision
« Elle ne démontre pas en quoi ce risque hypothétique, à le supposer fondé, serait de nature à entraîner à son égard des conséquences manifestement excessives [...] L'importance des condamnations ne saurait à elle seule caractériser de telles conséquences. »
Sur les aménagements (consignation ou garantie)
La Cour examine les demandes subsidiaires sur le fondement des articles 521 et 517 du Code de procédure civile, qui permettent au juge d'autoriser une consignation ou une garantie sans condition préalable liée aux conséquences manifestement excessives. Toutefois, M. [J] [U] a démontré une situation financière solide (notamment un patrimoine immobilier suffisant), rendant ces mesures inutiles pour préserver les droits des parties.
Sur la demande reconventionnelle
M. [J] [U] sollicitait des dommages et intérêts pour procédure abusive (5 000 euros). La Cour rejette cette demande, estimant que la SA Fidelidade n'avait pas abusé de son droit d'ester en justice faute d'éléments probants sur sa mauvaise foi.
Décision finale
- Rejet intégral des demandes principales et subsidiaires formulées par la SA Fidelidade.
- Rejet des dommages et intérêts pour procédure abusive demandés par M. [J] [U].
- Condamnation de la SA Fidelidade aux dépens et au paiement de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles.
Points importants et répercussions
- La décision illustre une application stricte des conditions cumulatives prévues par l'article 514-3 du Code de procédure civile.
- Elle clarifie que le simple montant élevé d'une condamnation ne suffit pas à établir des « conséquences manifestement excessives ».
- Les garanties financières ou consignations ne sont accordées qu'en cas d'insuffisance avérée des facultés financières du créancier.
Mots clés
Exécution provisoire, conséquences manifestement excessives, référé, premier président, arrêt d'exécution, garantie perte de licence, consignation, constitution de garantie, pouvoir discrétionnaire, risque de non-restitution