23-22.432
Résumé
En bref
La Cour de cassation, chambre sociale, par arrêt du 11 juin 2025 (n° 23-22.432), a rejeté le pourvoi formé par un joueur professionnel de rugby contestant la validité d’un protocole transactionnel conclu après la rupture anticipée de son contrat à durée déterminée pour faute grave. La Haute juridiction a jugé que la cour d’appel avait à bon droit retenu, sur le fondement des articles L. 1242-14, L. 1332-1 à L. 1332-3 du Code du travail et R. 1332-2 du même code, que le salarié avait reconnu avoir reçu la notification écrite et motivée de la sanction disciplinaire avant la signature du protocole, rendant ainsi sans fondement le moyen de nullité soulevé.
En détail
Parties en présence :
Le litige oppose M. [Y], joueur professionnel de rugby, à la société Section paloise rugby pro, société anonyme sportive professionnelle. M. [Y] a été engagé sous contrat à durée déterminée pour trois saisons sportives à compter du 14 mai 2018. Ce contrat a été rompu pour faute grave le 26 décembre 2019, puis un protocole transactionnel a été signé le 30 décembre 2019.
Problèmes juridiques en jeu :
La principale question porte sur la validité du protocole transactionnel conclu postérieurement à la rupture anticipée du contrat, et plus précisément sur la nécessité, pour le salarié, d'avoir eu connaissance effective des motifs de la rupture avant la signature de la transaction. Le salarié invoquait la nullité du protocole, soutenant ne pas avoir reçu la lettre de notification du licenciement avant la signature.
Question juridique principale :
La question centrale est de savoir si la transaction conclue entre les parties, après la notification d'une rupture de contrat à durée déterminée pour faute grave, est valable alors que le salarié conteste avoir eu connaissance effective des motifs de la rupture avant de signer le protocole.
Exposé du litige, faits et arguments :
M. [Y] a été licencié pour faute grave et a signé, quatre jours plus tard, un protocole transactionnel avec la société Section paloise rugby pro. Ce protocole prévoyait une indemnité transactionnelle et une renonciation réciproque à toute action relative au contrat de travail. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir des dommages-intérêts pour rupture anticipée et, subsidiairement, un solde d'indemnité transactionnelle. Il soutenait que la transaction était nulle, faute d'avoir eu connaissance des motifs de la rupture avant sa signature, comme l'exige l'article L. 1232-6 du Code du travail.
Plan et motivation de la décision :
Sur le fondement de l'article L. 1242-14 du Code du travail, la Cour rappelle que les dispositions relatives à la procédure de licenciement (notamment l'article L. 1232-6) ne s'appliquent pas à la rupture anticipée d'un CDD pour faute grave, laquelle relève des seules prescriptions des articles L. 1332-1 à L. 1332-3. L'article R. 1332-2 impose que la sanction soit notifiée par écrit, par lettre remise contre récépissé ou recommandée. La Cour de cassation constate que le protocole transactionnel, signé par le salarié, mentionne expressément la réception de la lettre de notification du 26 décembre 2019. Elle considère que cette mention, reconnue par le salarié, suffit à établir qu'il a eu connaissance des motifs de la rupture avant la signature de la transaction, conformément aux exigences du droit disciplinaire applicable aux CDD.
La Cour rejette ainsi l'argument selon lequel la preuve de la réception effective de la lettre de notification avant la signature du protocole n'aurait pas été rapportée, en soulignant que les termes du protocole transactionnel font foi de la reconnaissance, par le salarié, de la réception de la notification.
Extrait de la décision :
« La cour d'appel, répondant à l'argumentation prétendument délaissée, qui a relevé qu'aux termes du protocole transactionnel, notamment de son préambule, signé le 30 décembre 2019, le salarié avait reconnu avoir reçu la lettre du 26 décembre 2019 portant notification de la sanction disciplinaire et de ses motifs, en a exactement déduit que ce moyen de nullité du protocole transactionnel n'était pas fondé. »
Points de droit importants et répercussions :
La Cour de cassation rappelle la spécificité du régime de rupture anticipée des CDD pour faute grave, distinct de celui du licenciement pour motif personnel.
La reconnaissance, par le salarié, de la réception de la notification dans un protocole transactionnel, suffit à établir la connaissance des motifs, sans qu'il soit nécessaire de rapporter la preuve matérielle de la réception antérieure de la lettre.
Cette décision sécurise la pratique des transactions post-rupture anticipée de CDD dans le secteur sportif, en clarifiant la portée probatoire des protocoles transactionnels.
Mots clés
contrat à durée déterminée, faute grave, protocole transactionnel, rupture anticipée, notification écrite, transaction, article L. 1242-14 du Code du travail, article L. 1332-1 du Code du travail, validité de la transaction, preuve de la notification