24-11.471
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Résumé
En bref
La Chambre sociale de la Cour de cassation rejette le pourvoi d'un joueur de rugby professionnel. Elle valide l'analyse d'une cour d'appel qui avait qualifié une clause, insérée dans une promesse d'embauche, de clause pénale licite et non de clause de rupture unilatérale prohibée. Sur le fondement de l'article L. 222-2-7 du code du sport, la Cour juge que cette stipulation ne visait pas à permettre la résiliation d'un contrat de travail déjà formé, mais à sanctionner une rupture abusive des négociations précontractuelles. La demande de dommages-intérêts du joueur est donc définitivement écartée.
En détail
1. CADRE DE L'AFFAIRE
- Parties impliquées : M. [W] [R], joueur de rugby professionnel (demandeur au pourvoi), et la société Rugby club toulonnais (défenderesse).
- Problèmes juridiques principaux : La qualification juridique d'une clause insérée dans une promesse d'embauche, la distinction entre une clause de dédit (ou de rupture unilatérale) et une clause pénale, et le champ d'application de l'interdiction de la rupture unilatérale pure et simple des contrats de travail à durée déterminée (CDD) de sportifs professionnels.
- Question juridique principale : ⚖️ Une clause, insérée dans une promesse d'embauche et prévoyant le paiement d'une somme forfaitaire en cas de non-ratification du contrat de travail final, doit-elle être analysée comme une clause de rupture unilatérale prohibée par l'article L. 222-2-7 du code du sport, ou constitue-t-elle une clause pénale valide sanctionnant une rupture abusive des pourparlers ?
- Exposé du litige : Un joueur de rugby professionnel, estimant être lié au club pour une saison supplémentaire par une promesse d'embauche, a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir des dommages-intérêts pour rupture abusive et anticipée et négociation de mauvaise foi. Le joueur soutenait notamment qu'une clause du pré-contrat, qualifiée de "clause de dédit", était nulle car contraire aux dispositions d'ordre public régissant la rupture des CDD de sportifs. La cour d'appel l'a débouté de ses demandes, ce qui a motivé son pourvoi en cassation.
2. ANALYSE DES MOTIFS
La Cour de cassation concentre son analyse sur un unique moyen, relatif à la qualification et à la validité de la clause litigieuse contenue dans la promesse d'embauche. ❌ L'argumentation du joueur : la nullité de la clause de dédit Le demandeur au pourvoi faisait grief à l'arrêt d'appel d'avoir validé la clause litigieuse. Selon lui, cette stipulation, en permettant à l'une des parties de se désengager de la signature du contrat final moyennant le paiement de 20 000 euros, constituait une clause de rupture unilatérale pure et simple. Une telle clause serait, en application combinée des articles L. 1243-3 du code du travail et L. 222-2-7 du code du sport, nulle et de nul effet pour les CDD de sportifs professionnels. ⚠️ Le joueur considérait donc que la cour d'appel avait commis une erreur de droit en la qualifiant de clause pénale licite. ✅ La réponse de la Cour de cassation : la validation de la qualification de clause pénale La Haute Juridiction rejette le moyen en validant sans équivoque le raisonnement des juges du fond. 🔍 Elle rappelle d'abord le principe fondamental applicable en la matière, issu de l'article L. 222-2-7 du code du sport, qui prohibe expressément les clauses de rupture unilatérale dans les contrats de travail à durée déterminée des sportifs professionnels. Ce texte vise à assurer la stabilité et la sécurité juridique de ces contrats spécifiques.
"Aux termes de l'article L. 222-2-7 du code du sport, les clauses de rupture unilatérale pure et simple du contrat de travail à durée déterminée du sportif et de l'entraîneur professionnels salariés sont nulles et de nul effet." (Décision, point 5)
⚖️ Ensuite, la Cour procède à une analyse téléologique de la clause litigieuse pour en déterminer la véritable nature. Elle examine son objet et son positionnement dans la relation entre les parties. La Cour constate que la cour d'appel a correctement distingué la phase précontractuelle de la phase d'exécution du contrat. La clause ne s'appliquait qu'en cas de non-ratification du contrat définitif, c'est-à-dire avant même que la relation de travail ne soit formellement établie sous le régime du CDD. Elle ne conférait donc pas un droit de résiliation d'un contrat en cours, mais sanctionnait un manquement dans le processus de sa conclusion. ➡️ La Cour de cassation en conclut que la cour d'appel a opéré une exacte qualification juridique en retenant qu'il s'agissait d'une clause pénale destinée à indemniser forfaitairement le préjudice subi du fait d'une rupture abusive des négociations.
"La cour d'appel, qui a retenu que les stipulations litigieuses s'analysaient comme une clause pénale en cas de rupture abusive des négociations, en sorte qu'elles n'ouvraient pas aux parties une faculté de résiliation unilatérale du contrat de travail à duré déterminée, a fait l'exacte application de la loi." (Décision, point 7)
Cette décision consacre la validité des clauses pénales dans les promesses d'embauche de sportifs, dès lors qu'elles ont pour seul objet de sécuriser la phase de négociation et non d'organiser une faculté de dédit une fois le contrat de travail à durée déterminée conclu.
3. EXTRAIT PRINCIPAL DE LA DÉCISION
"La cour d'appel, qui a retenu que les stipulations litigieuses s'analysaient comme une clause pénale en cas de rupture abusive des négociations, en sorte qu'elles n'ouvraient pas aux parties une faculté de résiliation unilatérale du contrat de travail à durée déterminée, a fait l'exacte application de la loi." (Point 7 de la décision)
4. POINTS DE DROIT
- 🎯 Qualification juridique : La qualification d'une clause dépend de son objet et de sa finalité. Une clause sanctionnant la non-finalisation d'un contrat est une clause pénale et non une clause de rupture unilatérale.
- 🔗 Distinction des phases contractuelles : Il est essentiel de distinguer la phase précontractuelle (négociations, promesse d'embauche) de la phase d'exécution du contrat. Les règles applicables à chaque phase sont distinctes.
- ⚖️ Champ d'application de l'article L. 222-2-7 du code du sport : La prohibition des clauses de rupture unilatérale prévue par ce texte s'applique strictement à la rupture d'un contrat de travail à durée déterminée déjà formé et en cours. Elle ne s'étend pas aux mécanismes visant à sanctionner la rupture abusive des pourparlers.
- 👨⚖️ Validité des clauses pénales précontractuelles : Une clause pénale insérée dans une promesse d'embauche est licite si elle vise à indemniser le préjudice résultant de la rupture fautive des négociations et non à organiser une faculté de dédit d'un contrat conclu.
Mots clés
Contrat de travail sportif, CDD d'usage, Clause pénale, Clause de dédit, Promesse d'embauche, Rupture abusive des négociations, Article L. 222-2-7 du code du sport, Qualification juridique, Rupture unilatérale, Pourparlers
NB : 🤖 résumé généré par IA