2301763
Résumé
En bref
Le Tribunal administratif de Bordeaux rejette la requête en annulation formée contre la décision d'un comité directeur de fédération sportive retirant sa délégation à un organe déconcentré. ➡️ Le juge administratif valide la sanction en procédant à une substitution de base légale. Il écarte le fondement réglementaire initialement erroné (article 5 du règlement intérieur) pour retenir le fondement statutaire adéquat, à savoir l'article 3 des statuts de la fédération, qui autorise le retrait de délégation en cas de défaillance avérée de l'organe. Le tribunal estime que les faits de mauvaise gestion financière, d'opacité et d'obstruction à la tutelle caractérisaient une telle défaillance et justifiaient la mesure prise.
En détail
1. CADRE DE L'AFFAIRE
- Parties impliquées : M. Incardona, président du comité départemental du jeu d'échecs de Lot-et-Garonne, et ledit comité (requérants) contre la Fédération Française des Échecs (FFE) (défenderesse).
- Problèmes juridiques principaux : Légalité externe (motivation, détournement de procédure) et interne (base légale, proportionnalité) d'une décision de retrait de délégation prise par une fédération sportive à l'encontre d'un de ses organes déconcentrés.
- Question juridique principale : ⚖️ La décision du comité directeur de la FFE de retirer sa délégation au comité départemental, prise en raison d'une défaillance dans sa gestion et sa gouvernance, est-elle entachée d'illégalité ?
- Exposé du litige : Suite à des signalements de clubs locaux concernant une gestion financière et une gouvernance jugées opaques, le comité directeur de la FFE a placé le comité départemental de Lot-et-Garonne sous tutelle financière, puis lui a retiré sa délégation. ❌ Les requérants contestent cette mesure, invoquant notamment son absence de motivation, un détournement de procédure et un défaut de base légale, la sanction étant selon eux disproportionnée. ✅ La FFE conclut au rejet, soutenant que la décision était fondée et pouvait, en tout état de cause, reposer sur l'article 3 de ses statuts.
2. ANALYSE DES MOTIFS
Le tribunal examine successivement les moyens de légalité externe et interne soulevés par les requérants pour valider la décision de la FFE.
A. Sur les moyens de légalité externe rejetés
Le tribunal écarte rapidement les moyens tirés du défaut de motivation et du détournement de procédure.
Concernant la motivation, sur le fondement des articles L. 211-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration, le juge constate que la décision notifiée au comité départemental comportait bien l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituaient le fondement.
Concernant le détournement de procédure, le juge relève le caractère purement allégué du moyen.
"si les requérants soutiennent que la procédure « a été détournée pour priver de ses fonctions représentatives un président élu d'un organe déconcentré et le châtier de ses positions « politiques » publiques s'opposant à la ligne de l'équipe dirigeante de la Fédération », cette allégation n'est assortie d'aucune explication ni d'aucun élément factuel." (Décision, p. 4)
➡️ Ces deux moyens formels, non étayés, sont donc logiquement rejetés.
B. Sur la base légale de la décision : l'office du juge et la substitution de base légale
Le cœur du raisonnement du tribunal repose sur la validation du fondement juridique de la sanction par le mécanisme de la substitution de base légale. 👨⚖️ Le juge administratif rappelle d'abord son office, qui lui permet de substituer d'office un fondement juridique à un autre, à condition que cette substitution ne prive pas le justiciable de garanties procédurales et que l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation.
"Lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée." (Décision, p. 4)
En l'espèce, 🔍 le tribunal constate que la sanction ne pouvait reposer sur l'article 5.1.2 du règlement intérieur, qui vise le refus de mise en conformité des statuts, alors que les griefs portaient sur la gestion financière. En revanche, sur le fondement de l'article 3 des statuts de la FFE, qui autorise le comité directeur à prendre toute mesure utile, y compris le retrait de délégation, en cas de défaillance d'un organe déconcentré, la décision était légalement fondée. Le juge procède donc à la substitution.
"la décision attaquée trouve son fondement légal dans les dispositions précitées de l'article 3 des statuts de la Fédération qui peuvent être substituées à celles de l'article 5 du règlement intérieur de la Fédération dès lors que ces dernières dispositions prévoient un retrait de la délégation en raison d'un refus de modifier les statuts, alors qu'au cas présent, les faits qui sont imputés au comité départemental sont relatifs à sa gestion financière. Cette substitution de base légale n'a pour effet de priver les requérants d'aucune garantie et l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation pour appliquer l'une ou l'autre de ces dispositions." (Décision, pp. 4-5)
✅ Cette substitution de base légale permet de purger le vice initial et de valider le fondement juridique de la décision contestée.
C. Sur l'appréciation des faits constitutifs de la défaillance
Une fois la base légale consolidée, ⚖️ le tribunal procède à une analyse factuelle pour vérifier si les agissements reprochés au comité départemental caractérisaient bien une défaillance au sens de l'article 3 des statuts. 🔎 Il relève un faisceau d'indices concordants :
- 1️⃣ Le refus du président de convoquer une assemblée générale demandée par des clubs membres.
- 2️⃣ L'absence d'explications convaincantes sur certaines dépenses lors de l'assemblée générale finalement tenue.
- 3️⃣ L'obstruction à l'exercice de la mise sous tutelle, notamment par le refus de soumettre les dépenses à validation et de donner accès aux comptes.
- 4️⃣ La gestion jugée autocratique et solitaire du président.
Le juge synthétise ces manquements graves qui justifient la qualification de défaillance.
"M. Incardona n'a pas sollicité la ligue pour validation des dépenses du comité et ne lui a pas donné d'accès pour qu'elle puisse consulter les comptes du comité départemental et exercer sa tutelle, que le comité est « manifestement administré par une seule personne, ce que certains clubs contestent » et que M. Incardona « décide sans en référer au comité directeur »." (Décision, p. 5)
➡️ Face à ces éléments factuels non contestés sérieusement par les requérants, le tribunal conclut que le retrait de délégation constituait une exacte application de l'article 3 des statuts de la Fédération et n'était donc pas une sanction disproportionnée.
3. EXTRAIT PRINCIPAL DE LA DÉCISION
"Ainsi que le fait valoir la Fédération française des échecs, la décision attaquée trouve son fondement légal dans les dispositions précitées de l'article 3 des statuts de la Fédération qui peuvent être substituées à celles de l'article 5 du règlement intérieur de la Fédération (...) Cette substitution de base légale n'a pour effet de priver les requérants d'aucune garantie et l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation pour appliquer l'une ou l'autre de ces dispositions. Ainsi, le moyen tiré du défaut de base légale de la décision doit être écarté. (Décision, pp. 4-5)
4. POINTS DE DROIT
- 👨⚖️ Office du juge administratif : Confirmation du pouvoir du juge de l'excès de pouvoir de procéder à une substitution de base légale pour une décision prise par une fédération sportive, personne privée chargée d'une mission de service public.
- 🔗 Conditions de la substitution de base légale : La substitution est possible si l'administration dispose, sur le fondement du texte substitué, du même pouvoir d'appréciation et si l'intéressé n'est privé d'aucune des garanties procédurales attachées à l'application du texte adéquat.
- 🎯 Qualification de la défaillance d'un organe déconcentré : Un faisceau d'indices concordants (gestion financière opaque, gouvernance autocratique, obstruction aux mesures de contrôle et de tutelle de la fédération) est de nature à caractériser la défaillance d'un comité départemental au sens des statuts fédéraux, justifiant une mesure de retrait de délégation.
- ⚖️ Pouvoir disciplinaire des fédérations : Reconnaissance du pouvoir d'une fédération sportive de sanctionner ses organes déconcentrés en cas de manquement grave à leurs obligations, dans le respect des principes de légalité et de proportionnalité.
Mots clés
Retrait de délégation, substitution de base légale, fédération sportive, organe déconcentré, pouvoir disciplinaire, défaillance, tutelle financière, office du juge, code du sport, statuts fédéraux.
NB : 🤖 résumé généré par IA