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Résumé
En bref
Le Tribunal administratif de Dijon a rejeté la requête de M. B tendant à l’annulation de la décision du préfet de l’Yonne lui interdisant à titre définitif l’exercice des fonctions d’éducateur sportif. La juridiction motive essentiellement sa décision sur le fondement des articles L. 212-1, L. 212-9 et R. 212-86 du Code du sport, qui interdisent l’exercice d’activités d’enseignement sportif à toute personne condamnée pour certains délits, en particulier le délit visé à l’article 222-13 du Code pénal. Le préfet, placé en situation de compétence liée, était ainsi tenu de prononcer cette interdiction. Tous les moyens de la requête sont donc rejetés.
En détail
Les parties à l’instance sont M. A B, éducateur sportif, requérant représenté par Me Poix, et le préfet de l’Yonne, défendeur. Le litige porte sur une décision préfectorale du 12 février 2024 interdisant définitivement à M. B l’exercice de ses fonctions d’éducateur sportif, en raison d’une condamnation pénale pour violences sur conjoint (article 222-13 du Code pénal). M. B sollicitait l’annulation de cette décision, invoquant plusieurs moyens de légalité interne et externe (incompétence, vice de procédure, disproportion, erreur de droit et d’appréciation).
Exposé du litige, faits et arguments
M. B, détenteur d’une carte professionnelle d’éducateur sportif, a vu son casier judiciaire comporter une inscription pour violence sur conjoint, infraction relevant du champ de l’article 222-13 du Code pénal, à la suite d’une condamnation du tribunal correctionnel de Dijon en mars 2023. Se fondant sur l’article L. 212-9 du Code du sport, le préfet a interdit à M. B toute activité d’enseignement ou d’encadrement sportif, lui ordonnant en outre de restituer sa carte professionnelle. Le requérant soutenait que la condamnation n’impliquait pas de lien avec l’exercice de la profession, relevait du contexte personnel, et invoquait aussi l’absence de caractère contradictoire et de consultation de la commission prévue à l’article L. 212-13 du Code du sport. À l’inverse, le préfet arguait de la compétence liée imposée par le texte.
Analyse des motifs : textes applicables et raisonnement du tribunal
Le tribunal rappelle que, selon l’article L. 212-9 du Code du sport (premier alinéa), nul ne peut enseigner, animer, encadrer ou entraîner une activité sportive, qu’il soit rémunéré ou bénévole, s’il a fait l’objet d’une condamnation pour l’un des délits énumérés au texte, dont celui du chapitre II, titre II du livre II du Code pénal, à l’exception du premier alinéa de l’art. 222-19. L’article 222-13, 6° du Code pénal vise expressément les violences commises sur le conjoint ou concubin, et prévoit une peine de trois ans d’emprisonnement. Sur le fondement de l’article R. 212-86 du Code du sport, le préfet ne peut délivrer ou maintenir la carte professionnelle aux personnes condamnées pour ces délits. Le juge écarte l’ensemble des griefs du requérant comme inopérants, dès lors que la décision contestée résulte d’une compétence liée interdite de modulabilité : la condamnation de M. B au titre de l’article 222-13 entraîne de plein droit l’incapacité d’exercer les fonctions d’éducateur sportif. Ni l’absence de lien direct entre l’infraction et l’activité professionnelle, ni le contexte psychique évoqué par le requérant, ni le caractère proportionné ou la procédure suivie ne peuvent être utilement discutés, la disposition étant d’ordre public et opérant de manière automatique. La consultation préalable de la commission, prévue à l’article L. 212-13 du Code du sport, concerne les mesures prises au titre de la police spéciale d’honorabilité, et non celles résultant de la compétence liée prévue à l’article L. 212-9.
Extrait de la décision : « L’administration se trouvant en situation de compétence liée, les moyens soulevés par le requérant (…) doivent être écartés comme inopérants. »
Le tribunal conclut donc que le préfet était tenu de notifier à M. B l’incapacité d’exercer, en application stricte des textes, et que la demande d’annulation devait être rejetée. En conséquence, la demande de prise en charge des frais de procédure par l’État, fondée sur l’article L. 761-1 du Code de justice administrative, est rejetée.
Points de droit essentiels et répercussions
Sont réaffirmés dans cette décision :
L’automaticité et l’indépendance de la sanction administrative d’incapacité professionnelle posée par l’article L. 212-9 du Code du sport ;
L’absence de pouvoir d’appréciation du préfet dès que le casier judiciaire comporte une condamnation visée au texte précité ;
La distinction nette entre, d’une part, les mesures fondées sur la compétence liée (incapacité) et, d’autre part, les mesures relevant de la police spéciale (pouvoir d’appréciation sous réserve de procédure contradictoire et saisine de la commission ad hoc).
Cette décision rappelle que toute condamnation des faits visés par l’article 222-13 du Code pénal constitue un obstacle absolu à l’exercice des fonctions d’éducateur sportif, indépendamment des circonstances ou du parcours du professionnel concerné.
Mots clés
incompatibilité d’honorabilité, compétence liée, article L. 212-9 du Code du sport, article R. 212-86 du Code du sport, incapacité professionnelle, condamnation pénale, violences sur conjoint, casier judiciaire, contrôle de légalité restreint, automatique sanction administrative