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Résumé
En bref
Le Tribunal administratif de Lyon, dans une ordonnance rendue le 6 décembre 2024, a rejeté la requête de l'association Les amis du virage sud et de la SASP Olympique de Marseille, qui demandaient la suspension d'un arrêté préfectoral interdisant la présence des supporters marseillais à Saint-Étienne pour un match de football. Le juge des référés a estimé que l'arrêté, pris sur le fondement des articles L. 521-2 du Code de justice administrative et L. 332-16-2 du Code du sport, était proportionné et justifié par des risques graves pour l'ordre public. La décision repose principalement sur l'antagonisme historique entre les supporters des deux clubs, les incidents récents, et la mobilisation limitée des forces de l'ordre.
En détail
Parties impliquées :
- Requérants : L'association Les amis du virage sud et la SASP Olympique de Marseille, représentées par Me Grimaldi.
- Défendeur : Le préfet de la Loire.
Problèmes juridiques en jeu :
- La légalité d'une mesure administrative restreignant les libertés fondamentales (liberté d'aller et venir, liberté de réunion).
- La proportionnalité de l'arrêté préfectoral au regard des risques invoqués pour l'ordre public.
Question juridique principale :
L'arrêté préfectoral interdisant aux supporters marseillais d'accéder à Saint-Étienne est-il manifestement illégal au regard des libertés fondamentales protégées par l'article L. 521-2 du Code de justice administrative ?
Faits et arguments des parties :
Les requérants contestaient un arrêté du préfet de la Loire interdisant, les 8 et 9 décembre 2024, la circulation et le stationnement des supporters marseillais autour du stade Geoffroy Guichard et dans le centre-ville de Saint-Étienne. Ils soutenaient :
- Une atteinte grave aux libertés fondamentales (liberté d'aller et venir, liberté d'association).
- Une mesure disproportionnée et injustifiée, les incidents invoqués étant anciens ou non imputables aux supporters marseillais.
- L'absence d'alternatives moins restrictives comme une limitation du nombre de supporters.
Le préfet a justifié l'arrêté par :
- L'antagonisme historique entre les supporters des deux clubs.
- Des incidents graves récents impliquant des ultras stéphanois (jets de projectiles sur des bus marseillais en mars 2024).
- Une mobilisation insuffisante des forces de l'ordre en raison d'autres événements majeurs (Fête des Lumières à Lyon, réouverture de Notre-Dame à Paris).
Motivation du Tribunal :
- Fondement juridique :
- L'article L. 521-2 du Code de justice administrative permet au juge des référés de suspendre une décision administrative si elle porte une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale.
- L'article L. 332-16-2 du Code du sport autorise le préfet à restreindre la liberté d'aller et venir pour prévenir des troubles graves à l'ordre public.
- Appréciation des risques pour l'ordre public :
- Le Tribunal a relevé que les matchs entre Marseille et Saint-Étienne ont historiquement donné lieu à des incidents graves (2019, 2020) et que ces tensions persistent malgré leur ancienneté.
- Les incidents récents (mars 2024) impliquant des ultras stéphanois ont ravivé les antagonismes entre les deux groupes.
- Le contexte national (mobilisation policière réduite) rendait difficile toute alternative moins restrictive.
- Proportionnalité de la mesure :
- Le Tribunal a jugé que l'interdiction totale était proportionnée face aux risques identifiés. Les mesures alternatives proposées (limitation du nombre de supporters) avaient déjà échoué par le passé.
Extrait de la décision :
« Il n'apparaît pas, en l'état de l'instruction, que la décision litigieuse serait entachée d'une illégalité manifeste justifiant sa suspension (...), ni que le prononcé de mesures moins contraignantes (...) serait manifestement suffisant pour prévenir les troubles graves à l'ordre public que la présence (...) des supporters marseillais est susceptible d'occasionner. »
Décision finale :
Le Tribunal administratif rejette la requête en considérant que l'arrêté préfectoral n'est pas manifestement illégal.
Points importants et répercussions :
- Confirmation que les interdictions générales peuvent être justifiées par un risque objectif d'atteinte à l'ordre public.
- Renforcement du rôle préventif accordé aux autorités administratives en matière de police lors d'événements sportifs à risque.
- Limitation stricte du contrôle juridictionnel sur ce type d'arrêtés lorsqu'ils sont suffisamment motivés.
Mots clés
Liberté fondamentale, article L. 521-2 Code justice administrative, article L. 332-16-2 Code du sport, police administrative, ordre public, proportionnalité, supporters ultras, antagonisme sportif, interdiction générale, événements sportifs à risque.