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Résumé
En bref
Le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 23 juin 2023 du président de la Fédération française de parachutisme, jugeant ce dernier incompétent pour prononcer une interdiction de vol sur le fondement de l'article 4.3 de la charte des écoles de la FFP, mais a rejeté les autres demandes de M. A. Le tribunal a validé la sanction disciplinaire du 17 mai 2024 prononcée par le comité de discipline d'appel, considérant la procédure régulière et la sanction proportionnée selon le règlement disciplinaire de la FFP (articles 2, 19, 22, 25). Il a rejeté les demandes indemnitaires et mis à la charge de M. A 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
En détail
Les parties en cause sont M. B A, pilote licencié auprès de la Fédération française de parachutisme (FFP), et la FFP. Le principal enjeu juridique concerne la compétence du président de la FFP à édicter une mesure d’interdiction de vol et la légalité de la sanction disciplinaire infligée ultérieurement à M. A, au regard du respect des garanties procédurales, du principe de proportionnalité et des droits de la défense. Faits et arguments des parties : M. A a fait l’objet, d’abord, d’une décision du 23 juin 2023 lui interdisant le vol de largage pour trois mois en raison du non respect des conditions de sécurité lors de vols impliquant des "wingsuiters". Il sollicite l’annulation de cette décision au motif de l’incompétence de son auteur, de violation des droits de la défense et d’absence de motivation. Il remet également en cause la sanction disciplinaire du 17 mai 2024 (interdiction d’être licencié, affilié, ou de participer à des manifestations sportives organisées par la FFP pendant sept ans dont deux avec sursis), dénonçant l’incompétence de l’organe disciplinaire, des vices de procédure, la partialité de ses membres, la violation de la règle non bis in idem ainsi que la disproportion de la sanction. Il demande conséquemment des indemnités importantes pour préjudices matériel et moral. Motivation du tribunal :
S'agissant de la sanction du 23 juin 2023, le Tribunal constate que, selon l'article 4.3 de la charte des écoles de la FFP, seules certaines autorités sont habilitées à prononcer une interdiction de vol à titre conservatoire (cadres techniques nationaux, dirigeants ou éducateurs sportifs des écoles ou établissements agréés). Le président de la FFP, n'entrant pas dans ces catégories, était incompétent pour prendre la décision du 23 juin 2023, justifiant ainsi son annulation.
S'agissant de la sanction du 17 mai 2024, le tribunal réfute les arguments d'irrégularité (incompétence, vice de forme, partialité, conflits d'intérêts), estimant que la composition du comité de discipline d'appel (dont certains membres sont également membres de la commission électorale de la FFP et dont le secrétaire de séance est consultant au sein du cabinet d'avocats qui représente la FFP dans la présente instance) n'entrave pas les garanties d'impartialité au sens de l'article L. 100-2 du code des relations entre le public et l'administration et de l'article 2 du règlement disciplinaire de la FFP. De même, le respect des droits de la défense et du contradictoire a été assuré conformément aux exigences du code précité. Le tribunal écarte enfin l'argument non bis in idem, rappelant que la première décision du 23 juin 2023 était une mesure de police conservatoire et non une sanction.
Sur le fond, le tribunal constate que M. A a manqué aux règles essentielles de sécurité du flash du 15 octobre 2018, de façon réitérée et délibérée, mettant en danger les wingsuiters et la stabilité de l'appareil. Ces violations, établies par des éléments probants recueillis par la FFP lors de son enquête (vidéos, témoignages, rapports d'enquête), justifient la sévérité de la sanction prévue aux articles 22 et 25 du règlement disciplinaire de la FFP. Le tribunal estime, conformément au principe de proportionnalité, que la sanction de sept ans, assortie d'un sursis de deux ans, n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Sur les conclusions indemnitaires : s'agissant de la décision du 23 juin 2023, le tribunal juge que, même si la décision était illégale, la même mesure aurait pu être prise par l'autorité compétente compte tenu de la gravité des faits. Il n'y a donc pas de lien de causalité entre la faute (incompétence) et le préjudice allégué. S'agissant de la décision du 17 mai 2024, celle-ci étant régulière, le tribunal considère qu'aucune indemnité n'est due à M. A. Extrait principal de la décision :
“Lorsqu'une personne sollicite le versement d'une indemnité en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité d'une décision administrative entachée d'incompétence, il appartient au juge administratif de rechercher, en forgeant sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties, si la même décision aurait pu légalement intervenir et aurait été prise, dans les circonstances de l'espèce, par l'autorité compétente. Dans le cas où il juge qu'une même décision aurait été prise par l'autorité compétente, le préjudice allégué ne peut alors être regardé comme la conséquence directe du vice qui entachait la décision administrative illégale.”
Mots clés
Incompétence de l'auteur, sanction disciplinaire, proportionnalité de la sanction, droits de la défense, principe d’impartialité, mesure de police conservatoire, règlement disciplinaire de la FFP, flash de sécurité, responsabilité administrative, non bis in idem.