150/2021
Résumé
En bref
Le Tribunal de commerce de Madrid a partiellement accueilli la plainte déposée par la European Super League Company S.L. (ESLC) contre l'UEFA et la FIFA. Il a jugé que ces deux instances ont abusé de leur position dominante et entravent la libre concurrence sur le marché. Cette décision est basée sur les articles 101 et 102 du Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne (TFUE).
En détail
Les parties impliquées dans cette affaire sont la European Super League Company S.L. (ESLC) qui a porté plainte contre l'UEFA et la FIFA. La ESLC allègue que l'UEFA et la FIFA abusent de leur position dominante en s'attribuant le pouvoir de bloquer la participation à des compétitions alternatives et en imposant des restrictions injustifiées et disproportionnées, en violation des articles 101 et 102 du TFUE.
Le jugement déclare que certains articles des statuts et règlements de la FIFA et de l'UEFA constituent une pratique restrictive (art. 101 TFUE) et un abus de position dominante (art. 102 TFUE), notamment :
- L’article 22 des Statuts de la FIFA sur le devoir de surveillance des confédérations en cas de création de compétitions privées ;
- Les articles 70, 71, 72 et 73 des Statuts de la FIFA sur son pouvoir d’autorisation, de restriction et de sanction sur la participation des clubs et des joueurs à des compétitions tierces ;
- L'article 6 du Règlement FIFA des Matches Internationaux, dont l’alinéa 1 dispose que : “Les matches internationaux peuvent uniquement être autorisés par la FIFA, une confédération ou un membre conformément au présent règlement.” ;
- L’article 49 et 51 des Statuts de l'UEFA sur son pouvoir d’autorisation, de restriction et de sanction sur la participation des clubs et des joueurs à des compétitions tierces à la FIFA.
Le Tribunal explique qu’il est impossible d’interdire in abstracto tout projet futur de compétition de football tierce à la FIFA et l’UEFA :
“Le recours doit être jugée bien fondée dans la mesure où l’action des défendeurs n'était pas seulement destinée à empêcher le développement d'un certain projet, mais à empêcher l'implantation d'un troisième concurrent et la modification du système monopolistique de l'organisation des compétitions, car la même défense a été maintenue tout au long de la procédure même lorsque le projet de la Super League a décliné ou du moins a été accepté qu'il ne sera pas développé dans les termes initialement proposés, ce qui indique que les actes initiaux étaient liés à l'opposition à la modification du système d'autorisation des compétitions par des concurrents tiers” (traduction libre)
Les juges espagnols, suivant le raisonnement de la CJUE, ont également critiqué le pouvoir discrétionnaire d’autorisation des compétitions tierces, fondé sur des critères subjectifs comme le mérite sportif et la solidarité :
“La CJUE exige que le pouvoir d'autorisation soit accompagné de "limites, obligations et d’un contrôle permettant d'exclure le risque d'exploitation abusive" ; c'est-à-dire de "critères matériels transparents, clairs et précis". De l'analyse exposée, il ressort qu'il n'existe aucun critère limitant l'action de l'UEFA et de la FIFA. Cela est d’autant plus important, comme dans le cas présent, lorsque des pouvoirs de contrôle et de sanction sont exercés, sans avoir été obtenus par le biais d'une prérogative de droit public.” (traduction libre)
Enfin, le tribunal estime qu’un système d’autorisation de la FIFA et de l’UEFA n’est pas en soi anticoncurrentiel, et donne quelques pistes d’amélioration :
“Le système d'autorisation n'étant pas restrictif en soi, c'est l'absence de réglementation qui détermine la restriction. D'autre part, d'autres mesures peuvent être adoptées, telles que la création d'un organisme autonome et indépendant des demandeurs, chargé de contrôler les autorisations de compétitions, ou la soumission aux tribunaux juridictionnels des différents Etats.” (traduction libre)
En tout état de cause, et dans la lignée de la décision de la CJUE du 21 décembre 2023, le Tribunal ordonne aux deux instances de cesser leurs pratiques et comportements anticoncurrentiels et d’en supprimer tous les effets.
Mots clés
UEFA, FIFA, Super League, droit de la concurrence, Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne, entente, abus de position dominante, monopole, liberté de concurrence, compétitions sportives