18/00874
Résumé
En bref
Le Tribunal judiciaire de Nancy, dans un jugement rendu le 7 février 2025, a confirmé la responsabilité de l'association Ovalie [Localité 8] XV pour les blessures subies par Monsieur [N] [L] lors d'un match de rugby en 2012. Sur le fondement de l'article 1242 du Code civil, il a été établi qu'une faute caractérisée par une violation des règles de jeu, imputable à un ou plusieurs joueurs non identifiés de l'équipe, engageait la responsabilité du club. La société GMF Assurances, en tant qu'assureur, a été condamnée in solidum avec l'association à indemniser Monsieur [L] à hauteur de 64.543,78 €, en réparation des préjudices subis.
En détail
Parties impliquées
- Demandeurs : Monsieur [N] [L], blessé lors d’un match de rugby, et son assureur, la MAIF.
- Défenderesses : L'association Ovalie [Localité 8] XV et la GMF Assurances (assureur du club).
- Intervenante volontaire : La Mutuelle Générale de l'Éducation Nationale (MGEN).
Problèmes juridiques en jeu
- Responsabilité civile de l'association sportive pour les dommages causés par ses membres.
- Obligation de garantie de l'assureur (GMF) envers l'association et la victime.
- Évaluation et indemnisation des préjudices corporels et patrimoniaux.
Question juridique principale
L'association Ovalie [Localité 8] XV peut-elle être tenue responsable des blessures infligées à Monsieur [L] par un joueur non identifié, et dans quelle mesure son assureur (GMF) doit-il garantir cette responsabilité ?
Faits et arguments des parties
Le 28 octobre 2012, lors d'un match de rugby, Monsieur [L] a été blessé par un coup violent porté après la fin d'une mêlée. Une expertise a conclu à une incapacité permanente partielle (IPP) de 20 %. La Cour d'appel de Nancy avait confirmé que le geste constituait une faute caractérisée dépassant les limites du jeu.
- Demandeurs : Ils invoquent la responsabilité du club sur le fondement de l'article 1242 du Code civil, demandant une indemnisation basée sur les conclusions d’expertise.
- Association Ovalie [Localité 8] XV : Elle admet sa responsabilité mais conteste certains postes de préjudice et demande à être garantie par GMF.
- GMF Assurances : Elle soutient que la faute dolosive exclut sa garantie (articles L.113-1 et L.121-12 du Code des assurances) et invoque l'absence de désignation du joueur fautif.
Motifs et raisonnement juridique
- Responsabilité de l'association
- Sur le fondement de l'article 1242 du Code civil, les associations sportives sont responsables des fautes caractérisées commises par leurs membres dans le cadre des activités qu'elles organisent. Le tribunal a retenu que le coup porté constituait une violation manifeste des règles du rugby.
- Extrait de la décision :
- Obligation de garantie par GMF
- Le tribunal a rejeté l’argument selon lequel une faute dolosive exclurait la garantie, car cette faute n’était pas imputable à l’association elle-même mais à ses membres (article L.121-2 du Code des assurances).
- L’absence d’identification du joueur fautif ne prive pas GMF de son recours subrogatoire, car aucun élément ne prouve que le club connaissait son identité.
- Évaluation des préjudices
- Le tribunal a fixé les indemnités comme suit :
- Déficit fonctionnel temporaire : 12.844 €
- Souffrances endurées : 14.000 €
- Déficit fonctionnel permanent : 22.366,67 €
- Préjudice d’agrément : 8.000 €
- Aide humaine : 533,11 €
- Total : 64.543,78 €, intérêts légaux inclus.
- Remboursement à la MAIF
- GMF et Ovalie ont été condamnées in solidum à rembourser à la MAIF une avance versée au titre du déficit fonctionnel permanent (12.633,33 €) mais pas pour les frais d’aménagement non justifiés.
« La gravité des blessures subies […] constituait une faute caractérisée […] dépassant manifestement les limites de la combativité normale dans la pratique du rugby. »
Points importants et répercussions
- Cette décision confirme que les clubs sportifs peuvent être tenus responsables des fautes graves commises par leurs membres même non identifiés.
- Elle clarifie que les assureurs ne peuvent exclure leur garantie en invoquant une faute dolosive sans preuve directe contre l’assuré.
- Les critères d’évaluation des préjudices corporels sont détaillés et alignés sur les pratiques jurisprudentielles.
Mots clés
Responsabilité civile sportive, Article 1242 Code civil, Faute caractérisée, Violation des règles de jeu, Garantie assurance, Article L.113-1 Code des assurances, Déficit fonctionnel permanent, Préjudice d’agrément, Subrogation assureur, Indemnisation préjudices corporels, Faute dolosive