22/06431
Résumé
En bref
Le Tribunal judiciaire de Paris, par ordonnance du 6 mars 2025, a jugé que la société BS & PARTNERS est irrecevable à agir contre le joueur de football professionnel M. [I] [D], n'étant pas partie au contrat d'agent sportif du 1er juillet 2019, conformément à l'article 1199 du Code civil et à l'article L.222-7 du Code du sport. En revanche, l'action engagée par M. [X] [B], agent sportif signataire du contrat, a été déclarée recevable, la prescription biennale du Code de la consommation n'étant pas applicable en l'espèce, au profit du délai quinquennal de droit commun de l'article 2224 du Code civil. L'affaire est renvoyée à la mise en état avec injonction de rencontrer un médiateur.
En détail
Parties impliquées et exposé du litige
La société BS & PARTNERS, représentée par son président M. [X] [B], agent sportif licencié auprès de la FFF, et M. [X] [B] à titre personnel, ont assigné M. [I] [D], joueur de football professionnel, devant le Tribunal judiciaire de Paris.
Les demandeurs sollicitent l'indemnisation de préjudices résultant, selon eux, de la résiliation abusive du contrat d'agent sportif conclu le 1er juillet 2019 entre M. [X] [B] et M. [I] [D]. La société BS & PARTNERS intervient en qualité de société d'agent sportif, tandis que M. [X] [B] intervient également à titre personnel.
Problèmes juridiques en jeu et arguments des parties
Deux moyens principaux étaient soulevés par le défendeur :
- L'irrecevabilité de l'action de la société BS & PARTNERS, qui ne serait pas partie au contrat litigieux.
- La prescription de l'action de M. [X] [B], au motif que le délai biennal de l'article L.218-2 du Code de la consommation serait applicable, le joueur étant, selon lui, un consommateur à la date de signature du contrat.
Les demandeurs soutenaient, à l'inverse, que la société avait qualité pour agir, les prestations ayant été réalisées pour son compte, et que la prescription applicable était de cinq ans, le contrat ayant une finalité professionnelle.
Motivation du tribunal
Sur le fondement des articles 30, 31 et 32 du Code de procédure civile, le tribunal rappelle que l'action n'est ouverte qu'à ceux qui ont un intérêt légitime et que toute prétention émise par une personne dépourvue du droit d'agir est irrecevable. Sur le fondement de l'article 1199 du Code civil, le contrat ne crée d'obligations qu'entre les parties.
Le tribunal constate que la société BS & PARTNERS n'est pas signataire du contrat du 1er juillet 2019, lequel a été conclu personnellement par M. [X] [B] en qualité d'agent fédéral FFF. La mention de la société en première page du contrat ne suffit pas à établir sa qualité de partie, la signature étant apposée en nom personnel. En application de l'article L.222-7 du Code du sport, seule une personne physique peut être titulaire de la licence FFF et signer valablement un contrat d'agent sportif. La société, simple structure d'exercice, ne saurait être partie au contrat d'agence, même si elle a pu intervenir dans des actes d'exécution ou de facturation subséquents.
Extrait de la décision :
« Il s'évince des mentions typographiées à l'acte conclu le 1er juillet 2019 que c'est bien la personne physique qui est signataire de l'acte en son nom personnel. En effet, en vertu de l'article L.222-7 du code du sport, seule une personne physique peut être titulaire de la licence FFF et signer valablement un tel contrat. »
Le tribunal écarte ainsi l'argument selon lequel la société, du seul fait de la réalisation des prestations ou de l'émission de factures, aurait acquis la qualité de partie au contrat d'agent sportif.
S'agissant de la prescription, le tribunal examine la qualification du joueur au regard du droit de la consommation. Il rappelle, sur le fondement de l'article liminaire du Code de la consommation et de la jurisprudence européenne et nationale, qu'un contrat conclu dans le cadre d'une activité professionnelle ne relève pas du régime protecteur du consommateur. Le contrat d'agent sportif, même conclu alors que le joueur était mineur et stagiaire, avait une finalité résolument professionnelle, s'inscrivant dans la gestion de carrière du joueur. En conséquence, la prescription biennale de l'article L.218-2 du Code de la consommation ne s'applique pas, mais le délai quinquennal de l'article 2224 du Code civil.
Le tribunal déclare ainsi l'action de M. [X] [B] recevable, celle-ci ayant été engagée dans le délai de cinq ans suivant la révocation du mandat.
Points de droit importants et répercussions
- Distinction entre la personne physique titulaire de la licence d'agent sportif et la société d'exercice : Seule la personne physique peut être partie au contrat d'agent sportif, la société n'ayant pas qualité pour agir sur le fondement d'un contrat auquel elle n'est pas partie, même si elle intervient dans l'exécution.
- Qualification professionnelle du joueur : Même jeune et en formation, le joueur qui conclut un contrat d'agent sportif agit à des fins professionnelles, excluant la qualification de consommateur et la prescription biennale.
- Portée de la décision : Cette décision clarifie la portée des textes applicables aux contrats d'agent sportif, notamment l'article L.222-7 du Code du sport et l'article 1199 du Code civil, et rappelle que la structure sociétaire ne permet pas de contourner les exigences de la signature personnelle du titulaire de la licence.
Mots clés
contrat d’agent sportif, société d’exercice, irrecevabilité, qualité à agir, prescription quinquennale, prescription biennale, professionnel, consommateur, article L.222-7 Code du sport, article 1199 Code civil