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Résumé
En bref
Le Conseil d'État rejette le recours d'un boxeur professionnel sanctionné par l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) pour un contrôle positif au tuaminoheptane. Sur le fondement de l'article L. 232-9 du code du sport, la Haute juridiction administrative confirme une interprétation stricte de la matérialité de l'infraction : la présence d'une substance interdite dans l'organisme pendant la période "en compétition" caractérise le manquement, peu importe que la prise ait eu lieu la veille ou sur prescription médicale. Le Conseil valide également l'appréciation de la faute : si l'origine médicale permet de retenir l'absence de faute significative (réduction de sanction), elle ne suffit pas à établir l'absence totale de faute (exonération), le sportif devant faire preuve d'une vigilance accrue. Dispositif : Rejet de la requête (sanction de 12 mois d'interdiction maintenue).
En détail
1. CADRE DE L'AFFAIRE
Cette affaire oppose M. B... A..., boxeur (le "requérant"), à l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD). Les faits remontent au 9 décembre 2023, lors d'un contrôle antidopage réalisé en compétition qui a révélé la présence de tuaminoheptane (substance spécifiée, classe S6) dans les urines du sportif. M. A... ne contestait pas la présence de la substance mais argüait qu'elle provenait de la prise d'un médicament (Rhinofluimicil), prescrit par un médecin pour une otite, et administré pour la dernière fois la veille du combat à 22h00, soit avant le début théorique de la compétition. La question juridique principale soumise au Conseil d'État était de savoir si la prise d'un médicament sur ordonnance en dehors des horaires de la compétition, mais dont les traces subsistent lors du contrôle, permet d'écarter la matérialité de l'infraction ou de bénéficier d'une exonération totale de sanction pour absence de faute.
2. ANALYSE DES MOTIFS
Le Conseil d'État valide le raisonnement de la Commission des sanctions en suivant un plan classique : régularité de la procédure, matérialité de l'infraction, et proportionnalité de la sanction.
A. Sur la régularité procédurale et la matérialité de l'infraction
❌ Sur le moyen tiré de l'irrégularité de la convocation Le requérant soutenait que le délai de convocation n'avait pas été respecté. 🔍 Le Conseil d'État procède à une vérification factuelle du décompte des jours au regard de l'article R. 232-12-1 du code du sport et du règlement intérieur de l'AFLD. La juridiction administrative constate que la convocation envoyée le 23 avril pour une séance le 28 avril respecte le délai de cinq jours francs requis, validant ainsi la procédure 1️⃣. ✅ Sur la définition temporelle de la "période en compétition" Le point central du litige portait sur l'application de l'article L. 232-9 du code du sport relatif à l'interdiction de substances. Le requérant faisait valoir que la prise du médicament avait eu lieu la veille de la compétition. 👨⚖️ Le Conseil d'État rejette cet argument en opérant une distinction fondamentale entre le moment de l'ingestion et la période d'interdiction. En se référant à l'amendement de l'annexe I de la convention internationale, le juge rappelle que la période "en compétition" débute la veille à 23h59. Dès lors, la responsabilité objective du sportif est engagée par la seule présence de la substance dans l'échantillon prélevé pendant cette période, rendant inopérant l'argument de l'antériorité de la prise :
"Le sportif est tenu de s'assurer qu'une substance interdite en compétition ne soit pas présente dans son organisme pendant toute la période ainsi déterminée, jusqu'au moment de collecte des échantillons en relation avec cette compétition, sans qu'aient d'incidence à cet égard la date à laquelle la substance a pénétré dans son organisme" (Décision, point 12)
➡️ Cette interprétation confirme que l'élément matériel de l'infraction de dopage est constitué par la détection de la molécule durant la fenêtre de compétition, indépendamment de la pharmacocinétique ou de l'horaire de consommation.
B. Sur l'appréciation de la faute et la sanction
🔍 Sur la distinction entre absence de faute et absence de faute significative Le requérant sollicitait l'exonération totale prévue par le I de l'article L. 232-23-3-10 du code du sport. Toutefois, le Conseil d'État valide l'analyse plus nuancée de la Commission des sanctions. ⚖️ Si l'origine médicamenteuse est prouvée, elle ne suffit pas à caractériser une ignorance totale du risque. Le juge considère que le sportif, en ingérant un médicament, ne pouvait ignorer qu'il utilisait une substance, manquant ainsi à son devoir de "plus grande vigilance" :
"M. A..., alors même qu'il a pris la substance en cause sur prescription médicale, n'établit pas qu'il ignorait, ne soupçonnait pas ou n'aurait pas pu raisonnablement savoir ou soupçonner, même en faisant preuve de la plus grande vigilance, qu'il avait utilisé une substance interdite" (Décision, point 14)
✅ En revanche, le Conseil approuve l'application du II de l'article L. 232-23-3-10 du code du sport (absence de faute significative). La juridiction relève que la Commission a correctement qualifié la faute de "normale". 🎯 L'absence d'intention de dopage et la prescription médicale permettent de réduire la sanction standard (2 ans) à 12 mois, mais la qualité de sportif de haut niveau empêche une réduction plus drastique, car il appartenait à l'athlète de vérifier la composition du médicament prescrit.
"Elle a pu, sans erreur de droit ni contradiction de motifs, qualifier de "normale" cette faute non significative, prenant notamment en compte le niveau de pratique et d'éducation antidopage de l'intéressé" (Décision, point 15)
⚖️ Sur la proportionnalité Enfin, le Conseil d'État écarte le moyen tiré de la disproportion de la sanction. 1️⃣ Malgré le "jeune âge" et le "comportement antérieur irréprochable" invoqués, la suspension de 12 mois est jugée adaptée à la gravité du manquement (substance stimulante en compétition) et respecte le principe d'individualisation des peines.
3. EXTRAIT PRINCIPAL DE LA DÉCISION
"Le sportif est tenu de s'assurer qu'une substance interdite en compétition ne soit pas présente dans son organisme pendant toute la période ainsi déterminée [...], sans qu'aient d'incidence à cet égard la date à laquelle la substance a pénétré dans son organisme ou la circonstance qu'il l'ait prise conformément à une prescription médicale lorsque cette dernière n'a pas été assortie de l'autorisation d'usage thérapeutique" (Décision, point 12)
4. POINTS DE DROIT
- 🎯 Responsabilité objective : L'infraction de l'article L. 232-9 du code du sport est constituée par la simple présence de la substance durant la période de compétition, indépendamment du moment de la prise (même la veille).
- 🔗 Prescription médicale : Une prescription médicale sans Autorisation d'usage à des fins thérapeutiques (AUT) ne constitue pas un fait justificatif exonératoire de responsabilité.
- ⚖️ Gradation de la faute : La prise d'un médicament sur ordonnance permet de démontrer l'absence de faute significative (réduction de peine) mais pas l'absence de faute totale (suppression de peine), car le sportif a un devoir de vérification.
- 📋 Délais procéduraux : Le délai de convocation de 5 jours devant la Commission des sanctions se décompte de date à date en incluant les jours de notification et de séance.
Mots clés
Code du sport, Article L. 232-9, Tuaminoheptane, Période en compétition, Responsabilité objective, Absence de faute significative, Autorisation d'usage à des fins thérapeutiques (AUT), Prescription médicale, Proportionnalité de la sanction, Vigilance du sportif.
NB : 🤖 résumé généré par IA