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Résumé
En bref
Le Conseil d'État, statuant en référé sur le fondement de l'article L. 521-2 du Code de justice administrative, a suspendu l'arrêté du ministre de l'intérieur du 29 novembre 2024 interdisant le déplacement des supporters du Football Club de Nantes (FC Nantes) à Paris pour un match contre le Paris Saint-Germain (PSG).
Il a jugé que cette interdiction portait une atteinte grave et manifestement disproportionnée aux libertés fondamentales des supporters, notamment la liberté d'aller et venir, en l'absence de justification suffisante quant aux nécessités de préservation de l'ordre public.
L'État a également été condamné à verser 3000 euros à l'Association nationale des supporters au titre des frais de justice.
En détail
Parties impliquées
- Requérant : Association nationale des supporters.
- Défendeur : Ministre de l'intérieur.
Problèmes juridiques en jeu
- La légalité d'une interdiction générale de déplacement des supporters au regard des libertés fondamentales (liberté d'aller et venir, liberté d'association, liberté de réunion).
- La proportionnalité et la nécessité des mesures administratives prises pour préserver l'ordre public.
Question juridique principale
L'arrêté ministériel interdisant le déplacement des supporters du FC Nantes à Paris est-il justifié par les nécessités de préservation de l'ordre public et proportionné au regard des libertés fondamentales protégées par la loi ?
Faits et arguments
Le ministre de l'intérieur avait interdit, par arrêté, le déplacement individuel ou collectif des supporters du FC Nantes entre la Loire-Atlantique et l'Île-de-France le jour du match PSG-FC Nantes. Cette interdiction s'appuyait sur des antécédents de violences attribuées aux supporters nantais et parisiens. L'Association nationale des supporters a contesté cette mesure, soutenant qu'elle portait une atteinte grave et manifestement illégale à plusieurs libertés fondamentales, tout en étant disproportionnée et insuffisamment justifiée.
Raisonnement juridique
- Fondement légal : Le Conseil d'État a rappelé les dispositions des articles L. 332-16-1 et L. 332-16-2 du Code du sport, qui permettent au ministre ou au préfet d'interdire certains déplacements pour prévenir des troubles graves à l'ordre public. Il a également appliqué les critères d'urgence et d'atteinte grave aux libertés fondamentales prévus par l'article L. 521-2 du Code de justice administrative.
- Appréciation des faits :
- Les incidents invoqués par le ministre (violences lors de matchs précédents) étaient soit anciens, soit limités en ampleur.
- La rencontre PSG-FC Nantes n'était classée qu'au niveau 2 par la division nationale de lutte contre le hooliganisme, ce qui ne caractérise pas un risque élevé.
- Les mesures préfectorales déjà prises (interdictions locales autour du stade) étaient jugées suffisantes pour encadrer les risques.
- Proportionnalité :
- Le Conseil a estimé que l'interdiction générale était disproportionnée compte tenu du nombre limité de supporters concernés (environ 1000) et des capacités disponibles des forces de l'ordre.
- Il a souligné que des mesures moins restrictives auraient permis d'assurer la sécurité publique sans porter atteinte aux libertés fondamentales.
- Conclusion :
- Le Conseil d'État a jugé que la condition d'urgence était remplie en raison de l'application immédiate et disproportionnée de l'arrêté.
- Il a suspendu son exécution et condamné l'État à verser 3000 euros à l'association requérante.
Extrait de la décision :
« L'association requérante est fondée à soutenir que l'interdiction concernant les personnes se prévalant de la qualité de supporter FC Nantes ou se comportant comme tel édictée par l'arrêté attaqué du ministre de l'intérieur porte une atteinte grave et manifestement disproportionnée aux libertés fondamentales de ces personnes. »
Points importants et répercussions
- Cette décision réaffirme que les mesures restrictives prises pour préserver l'ordre public doivent être strictement nécessaires et proportionnées.
- Elle met en lumière les exigences élevées imposées à l'administration pour justifier les atteintes aux libertés fondamentales dans le cadre des manifestations sportives.
Mots clés
Liberté fondamentale, proportionnalité, ordre public, interdiction administrative, supporters, référé-liberté, Conseil d'État, article L. 521-2 du Code de justice administrative, article L. 332-16-1 du Code du sport, atteinte grave