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Résumé
En bref
La Cour d'appel d'Aix-en-Provence infirme partiellement le jugement de première instance dans un litige opposant un moniteur de tennis à son club employeur. Sur le fondement de l'article L. 3123-34 du Code du travail (ancien), la Cour prononce la requalification du contrat de travail intermittent en contrat à temps complet, sanctionnant l'absence de définition précise des périodes travaillées et non travaillées, cette carence créant une présomption irréfragable de temps plein. Par ailleurs, la juridiction déclare le licenciement pour motif économique dépourvu de cause réelle et sérieuse. Elle retient que l'employeur, en ne respectant pas le délai de réflexion d'un mois imposé par l'article L. 1222-6 du Code du travail pour la modification du contrat pour motif économique, s'est privé de la possibilité de se prévaloir du refus du salarié pour justifier la rupture.
En détail
1. CADRE DE L'AFFAIRE
Parties :
- Appelant : M. [B] [O], moniteur de tennis (salarié).
- Intimée : Association Sportive Tennis Club Bessois (employeur).
Contexte et Faits : Le salarié a été engagé via plusieurs CDD successifs puis un CDI intermittent à temps partiel soumis à la Convention collective nationale du sport. En juin 2019, invoquant des difficultés économiques (baisse des adhérents), l'association a proposé une réduction du temps de travail au salarié, puis l'a convoqué à un entretien préalable. Suite au refus de la modification par le salarié le 26 juin 2019, il a été licencié pour motif économique le 3 juillet 2019. Question juridique principale : Le non-respect du formalisme du contrat intermittent entraîne-t-il sa requalification en temps complet ? Le non-respect du délai de réflexion lors de la proposition de modification du contrat pour motif économique prive-t-il le licenciement subséquent de cause réelle et sérieuse ? Procédure : Le Conseil de prud'hommes avait initialement débouté le salarié de ses demandes principales. ❌ Le salarié a interjeté appel.
2. ANALYSE DES MOTIFS
A. Sur la requalification du contrat intermittent en temps complet
La Cour d'appel s'attache d'abord à vérifier la validité formelle du contrat de travail intermittent. 🔍 Sur le fondement de l'article L. 3123-34 du Code du travail, les juges rappellent que la nature même de ce contrat implique une alternance de périodes d'activité et d'inactivité qui doivent être impérativement définies. L'absence de mention de ces périodes dans le contrat constitue une irrégularité substantielle qui entraîne une sanction automatique : la requalification en CDI de droit commun à temps plein.
"Selon l'article L. 3123-34 du code du travail, le travail intermittent a pour objet de pourvoir des emplois permanents qui par nature comportent une alternance de périodes travaillées et de périodes non travaillées. Il en résulte qu'en l'absence de définition de ces périodes dans le contrat de travail, ce dernier doit être requalifié en contrat à durée indéterminée de droit commun à temps plein." (Décision, point 12)
Cette requalification emporte une conséquence procédurale majeure pour l'employeur. ⚖️ La juridiction précise que, face à cette irrégularité formelle, l'employeur ne dispose d'aucun moyen de preuve pour démontrer que le salarié n'était pas à sa disposition permanente. La présomption de temps complet devient alors irréfragable, interdisant tout débat sur la réalité des heures effectuées.
"Dans ce cas, l'employeur n'est pas admis à renverser la présomption résultant de cette irrégularité." (Décision, point 13)
➡️ En l'espèce, le contrat ne définissant pas ces périodes, la Cour fait droit à la demande de requalification et condamne l'association à un rappel de salaire conséquent (42 630 euros).
B. Sur la validité du licenciement économique
S'agissant de la rupture du contrat, la Cour examine la procédure suivie par l'employeur au regard de l'article L. 1222-6 du Code du travail. 📋 Ce texte impose un formalisme strict lorsque l'employeur envisage une modification d'un élément essentiel du contrat pour motif économique : il doit notifier la proposition par lettre recommandée et laisser au salarié un délai de réflexion d'un mois.
"Le délai d'un mois institué par l'article L 1222-6 du code du travail constitue une période de réflexion destinée à permettre au salarié de prendre parti sur la proposition de modification du contrat de travail en mesurant les conséquences de son choix ; il en résulte que l'inobservation de ce délai par l'employeur prive de cause réelle et sérieuse le licenciement fondé sur le refus par le salarié de la modification de son contrat de travail" (Décision, point 26)
L'analyse factuelle révèle ici une précipitation fautive de l'employeur. ⚠️ La Cour relève que la proposition de modification a été faite le 19 juin 2019 avec une date butoir de réponse au 28 juin 2019, soit un délai manifestement inférieur au mois légal. Puisque le motif du licenciement réside dans le refus de cette modification par le salarié, le vice procédural initial contamine la validité de la rupture. L'employeur ne peut se prévaloir d'un refus qu'il a sollicité sans respecter les formes légales impératives.
"Or, l'association n'a pas respecté la procédure prévue par l'article L 1222-6 du code du travail, ce qui lui interdit de se prévaloir d'un refus ou d'une acceptation par le salarié de la modification de son contrat de travail. Il convient en conséquence de déclarer le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse." (Décision, point 29)
➡️ Le licenciement est donc invalidé non pas sur le fondement économique (baisse d'activité), mais sur l'impossibilité pour l'employeur d'invoquer le refus de modification du contrat, faute d'avoir respecté le délai de réflexion légal.
3. EXTRAIT PRINCIPAL DE LA DÉCISION
Le passage suivant synthétise le cœur du raisonnement conduisant à l'invalidation du licenciement par la Cour :
"Force est ainsi de constater que l'employeur fait un lien direct entre le refus de modification du poste de travail et le licenciement. Or, l'association n'a pas respecté la procédure prévue par l'article L 1222-6 du code du travail, ce qui lui interdit de se prévaloir d'un refus ou d'une acceptation par le salarié de la modification de son contrat de travail." (Décision, point 29)
4. POINTS DE DROIT
- 🎯 Requalification du contrat intermittent : L'absence de mention des périodes travaillées et non travaillées dans un contrat intermittent (base article L. 3123-34 du Code du travail) entraîne une requalification automatique en temps complet, sans possibilité pour l'employeur de renverser cette présomption.
- ⏳ Modification du contrat pour motif économique : Le respect du délai de réflexion d'un mois prévu par l'article L. 1222-6 du Code du travail est une condition substantielle.
- ➡️ Conséquence sur le licenciement : Le non-respect de ce délai prive l'employeur du droit de se prévaloir du refus du salarié. Si le licenciement est motivé par ce refus (consécutif à des difficultés économiques), il devient de facto dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Mots clés
Contrat de travail intermittent, requalification temps complet, Article L. 1222-6 du Code du travail, licenciement économique, modification du contrat de travail, délai de réflexion, présomption irréfragable, périodes travaillées, Convention collective nationale du sport, moniteur de tennis
NB : 🤖 résumé généré par IA