23-11.740
Résumé
En bref
La Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, dans un arrêt du 20 novembre 2024, a rejeté le pourvoi des sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles.
Ces dernières contestaient leur condamnation à indemniser un ancien footballeur professionnel, M. [C], pour manquement à leur obligation d'information et de conseil dans le cadre d'investissements immobiliers financés par des prêts adossés à des contrats d'assurance-vie.
La Cour a confirmé que ces manquements avaient causé une perte de chance certaine pour M. [C] de réaliser des investissements mieux adaptés à sa situation personnelle et professionnelle, en se fondant notamment sur les articles 1147 du Code civil (ancien texte) et 1014 du Code de procédure civile.
En détail
Parties impliquées
- Demanderesses au pourvoi : Les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles, assureurs de la société FC Associés.
- Défendeur principal : M. [C], ancien footballeur professionnel.
- Autres défendeurs initiaux : La société FC Associés (liquidée) et d'autres parties désistées en cours de procédure.
Problèmes juridiques
- La question principale portait sur la responsabilité civile professionnelle de la société FC Associés en raison d'un manquement à ses obligations d'information et de conseil envers M. [C].
- L'évaluation du préjudice fondée sur une perte de chance liée à des investissements immobiliers mal adaptés était également en cause.
Faits
Entre 2006 et 2009, M. [C] a investi dans cinq biens immobiliers locatifs financés par des prêts in fine adossés à des contrats d'assurance-vie, sur les conseils de la société FC Associés. Ces investissements visaient à réduire sa fiscalité et constituer un patrimoine. Cependant, à la fin de sa carrière en 2017, il s'est retrouvé dans une situation financière désavantageuse : les biens avaient une valeur inférieure aux montants restant dus sur les emprunts.
Arguments des parties
- M. [C] : Il reprochait à la société FC Associés un défaut d'information sur les caractéristiques des investissements et leur inadéquation avec sa situation personnelle et ses objectifs professionnels.
- Les assureurs MMA : Ils contestaient l'existence d'un préjudice certain et critiquaient l'évaluation du montant du préjudice par la cour d'appel.
Motifs de la décision
- Manquement aux obligations professionnelles :
- La Cour a confirmé que la société FC Associés avait manqué à son devoir d'information et de conseil en ne prenant pas en compte les revenus fluctuants et limités dans le temps d'un joueur professionnel.
- Ce manquement a causé une perte de chance certaine pour M. [C], qui aurait pu choisir des investissements plus adaptés.
- Évaluation du préjudice :
- La cour d'appel avait évalué le préjudice en appliquant un coefficient de perte de chance (50 %) à la différence entre le passif (2 489 081,05 euros) et l'actif constitué par les biens immobiliers et les contrats d'assurance-vie (1 694 370,90 euros).
- La Cour a jugé cette évaluation conforme au principe de réparation intégrale sans profit pour la victime.
- Rejet des moyens soulevés par les assureurs :
- Le premier moyen, relatif au caractère hypothétique du préjudice, a été écarté comme manifestement infondé (article 1014 du Code de procédure civile).
- Les autres moyens critiquant l'évaluation chiffrée ont été rejetés comme relevant de l'appréciation souveraine des juges du fond.
Extrait de la décision
« Les manquements [de la société FC Associés] ont fait perdre à M. [C] une chance certaine de ne pas contracter ces investissements inadaptés […] lui permettant d'en être pleinement propriétaire dès la fin de sa carrière professionnelle. »
Répercussions
Cette décision réaffirme l'importance des obligations d'information et de conseil pesant sur les conseillers financiers, notamment dans le cadre des investissements complexes impliquant des particuliers ayant des profils spécifiques (ici, un sportif professionnel). Elle clarifie également l'approche jurisprudentielle quant à l'évaluation des pertes de chance.
Mots clés
perte de chance, gestion de patrimoine, obligation d'information, réparation du préjudice, Cour de cassation, article 1147 code civil, responsabilité civile, dommages et intérêts, assurance-vie, biens immobiliers