22-23.881
Résumé
En bref
Dans une affaire concernant le paiement de commissions par un footballeur professionnel à un avocat italien, agissant comme intermédiaire sportif, la Cour de cassation casse et annule l'arrêt de la cour d'appel de Reims du 25 octobre 2022 qui avait infirmé la déclaration constatant la force exécutoire en France d'une ordonnance d'injonction de payer rendue le 28 avril 2021 par le Tribunal de Milan (la Cour d'appel de Reims avait refusé la reconnaissance de l'ordonnance italienne au motif de l'absence de licence d'agent sportif en France de l’avocat italien en violation de l'ordre public international français). La Cour de cassation se fonde sur les articles 39 et 66 §1 du règlement UE n°1215/2012 dit "Bruxelles I bis" selon lesquels une décision exécutoire dans un État membre jouit de la force exécutoire dans les autres États membres sans qu'une déclaration constatant cette force exécutoire soit nécessaire.
En détail
Cette affaire oppose M. [O], avocat italien agissant comme intermédiaire sportif, à M. [B], footballeur professionnel.
Le litige porte sur le paiement de commissions dues par M. [B] à M. [O] au titre d'un mandat de représentation pour la négociation de contrats avec des clubs.
La question juridique principale est de savoir si l'ordonnance d'injonction de payer rendue par le tribunal de Milan le 28 avril 2021 en faveur de M. [O] a force exécutoire en France.
Le tribunal de Milan avait rendu cette ordonnance à la requête de M. [O] pour condamner M. [B] à lui payer des commissions. M. [O] a ensuite demandé une déclaration constatant la force exécutoire en France de cette décision italienne.
La Cour d'appel de Reims avait infirmé cette déclaration au motif que la condamnation de M. [B] incluait la rémunération d'une activité d'agent sportif exercée par M. [O] sans licence délivrée par une fédération française, en violation de l'ordre public international français.
Mais la Cour de cassation censure cette décision au visa des articles 39 et 66 du règlement "Bruxelles I bis".
Elle rappelle qu'une décision exécutoire dans un État membre jouit de la force exécutoire dans les autres États membres sans qu'une déclaration en ce sens soit nécessaire, pour les actions intentées depuis le 10 janvier 2015.
La Cour relève que l'ordonnance italienne avait été rendue le 28 avril 2021 sur une demande introduite le 22 avril 2021.
Dès lors, la procédure de déclaration de force exécutoire prévue par le code de procédure civile français n'était pas applicable.
Extrait de la décision :
“4. Aux termes du premier de ces textes, qui, selon le second, est applicable aux actions judiciaires intentées à compter du 10 janvier 2015, une décision rendue dans un Etat membre et qui est exécutoire dans cet Etat membre jouit de la force exécutoire dans les autres Etats membres sans qu'une déclaration constatant la force exécutoire soit nécessaire.
5. Pour infirmer la déclaration de la directrice des services de greffe judiciaires constatant la force exécutoire en France d'une ordonnance d'injonction de payer rendue le 28 avril 2021 par le tribunal ordinaire de Milan, l'arrêt retient que cette condamnation inclut la rémunération de la mise en relation par M. [O] de M. [B] avec un club français, activité contraire à l'ordre public international français, faute pour l'intermédiaire d'être titulaire d'une licence d'agent sportif délivrée par une fédération sportive française.
6. En statuant ainsi, alors que l'ordonnance du juge italien avait été rendue sur une demande introduite le 22 avril 2021, de sorte que la procédure de déclaration de la force exécutoire en France prévue par l'article 509-2 du code de procédure civile ne lui était pas applicable, la cour d'appel a violé les textes susvisés.”
La Cour de cassation statue donc au fond et confirme la force exécutoire en France de l'ordonnance italienne.
Mots clés
Injonction de payer, compétence judiciaire, reconnaissance de décision de justice étrangère, force exécutoire, Union européenne, règlement Bruxelles I bis, intermédiaire sportif, agent sportif, licence d'agent sportif, footballeur professionnel