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Résumé
En bref
Le Tribunal administratif de Mayotte a rendu une décision d'incompétence dans un litige opposant une société privée à un Comité Régional Olympique et Sportif (CROS) concernant la résiliation d'un marché de services. Sur le fondement des principes généraux régissant la nature des contrats administratifs et de l'ordonnance n° 2015-899, le juge administratif rappelle qu'un contrat conclu entre deux personnes privées relève par principe du droit privé, sauf à démontrer l'existence d'un mandat administratif ou la qualification d'association transparente. ❌ Décision : Le tribunal rejette la requête pour incompétence de la juridiction administrative. ⚖️ Sens : Le CROS, bien qu'organisme chargé d'une mission de service public et financé par des fonds publics, conserve sa nature d'association de droit privé autonome, entraînant la compétence du juge judiciaire.
En détail
1. CADRE DE L'AFFAIRE
- Parties : La SARL Pierre Investissement Ingénierie (Pi2i) (requérante) contre le CROS Mayotte (défendeur).
- Problème juridique : La qualification juridique du contrat conclu entre une association sportive (CROS) et un prestataire privé, et par voie de conséquence, la détermination de l'ordre de juridiction compétent (administratif ou judiciaire).
- Question de droit : Un marché passé par un CROS, financé par une subvention publique départementale pour l'organisation d'assises du sport, constitue-t-il un contrat administratif par l'effet de la théorie de la transparence ou du mandat tacite ?
- Exposé du litige : Dans le cadre de la candidature aux Jeux des Îles 2027, le Département de Mayotte a subventionné le CROS. Ce dernier a contracté avec la société Pi2i pour une assistance à maîtrise d'ouvrage. Suite à la résiliation du marché par le CROS, la société a saisi le juge administratif pour contester la rupture et demander réparation (37 500 €). Le CROS a soulevé une exception d'incompétence.
2. ANALYSE DES MOTIFS
Le tribunal structure son raisonnement en examinant successivement les deux exceptions permettant de requalifier un contrat entre personnes privées en contrat administratif : la théorie de l'association transparente et la théorie du mandat.
A. Sur la qualification d'association transparente
Le juge procède d'abord à une analyse méthodique 🔍 du statut du CROS pour déterminer s'il peut être qualifié d'entité "transparente", c'est-à-dire une structure privée fictive dissimulant l'action de la personne publique. Pour ce faire, le tribunal vérifie les critères cumulatifs de la jurisprudence (création, contrôle, ressources). S'il admet le financement public majoritaire, il écarte fermement le critère du contrôle organique du Département sur le CROS. L'analyse des statuts révèle en effet une autonomie décisionnelle vis-à-vis de la collectivité territoriale :
"Il résulte également de l'instruction [...] que, conformément à son article 4, la composition de ses organes de direction ne prévoit pas la présence de représentants du département de Mayotte de sorte que son organisation et son fonctionnement ne sont pas placés sous le contrôle de ce dernier." (Décision, point 5)
Cette absence de contrôle structurel est dirimante. Le tribunal précise 👨⚖️ que ni la mission de service public, ni l'existence d'un comité de pilotage temporaire incluant le Département ne suffisent à priver l'association de son autonomie juridique. En conséquence, le lien ombilical nécessaire à la qualification de transparence fait défaut ❌ :
"Par suite, s'il n'est pas contesté qu'il relève bien du champ de la commande publique en qualité « d'organisme de droit public » et qu'il tire l'essentiel de ses ressources des subventions publiques qui lui sont accordées, le CROS Mayotte ne peut être regardé comme une association transparente." (Décision, point 5)
L'autonomie statutaire du CROS, placé sous l'égide du CNOSF et non de la collectivité locale, fait donc obstacle à ce que le contrat soit réputé conclu directement par le Département.
B. Sur l'existence d'un mandat administratif
Dans un second temps, le tribunal recherche si le CROS a agi au nom et pour le compte du Département sur le fondement de l'article 1984 du Code civil appliqué au droit administratif. Le juge examine 🔎 la convention de subvention initiale pour y déceler d'éventuels indices d'un mandat (substitution de la collectivité, direction des actes d'exécution). L'analyse démontre l'absence de stipulations confiant au CROS le soin d'agir au nom de la collectivité :
"Aucune de ses stipulations ne fixe de conditions particulières prévues pour son exécution telles que le maintien de la compétence du département de Mayotte pour décider des actes à prendre pour la réalisation de l'opération ou sa substitution au CROS Mayotte pour engager des actions contre les personnes avec lesquelles celui-ci a conclu des contrats" (Décision, point 6)
En l'absence de ces clauses exorbitantes caractéristiques d'un mandat administratif, et le contrat litigieux n'étant pas l'accessoire indissociable d'un contrat de droit public, la qualification retombe sur le principe ⚖️ : un contrat entre deux personnes privées est un contrat de droit privé. Cette constatation entraîne mécaniquement l'incompétence de la juridiction administrative ➡️ :
"La qualification de contrat administratif doit, en vertu des critères sus-énoncés, être écartée et l'exception d'incompétence de la juridiction administrative opposée en défense accueillie." (Décision, point 6)
3. EXTRAIT PRINCIPAL DE LA DÉCISION
Le passage suivant synthétise le cœur du raisonnement sur la distinction entre financement public et nature administrative du contrat :
Extrait principal de la décision : "Le contrat conclu entre deux personnes privées revêt, en principe, le caractère d'un contrat de droit privé à l'exception des cas dans lesquels l'un au moins des signataires agit comme le mandataire d'une personne publique. [...] Par ailleurs, les contrats conclus entre personnes privées sont en principe des contrats de droit privé, hormis le cas où l'une des parties agit pour le compte d'une personne publique ou celui dans lequel ils constituent l'accessoire d'un contrat de droit public." (Point 4 de la décision)
4. POINTS DE DROIT
La décision confirme et illustre plusieurs principes essentiels en droit du sport et contentieux administratif :
- 🎯 Principe organique : Un contrat conclu entre deux personnes morales de droit privé (ici un CROS et une société commerciale) est, par principe, un contrat de droit privé, relevant de la compétence du juge judiciaire.
- 🔗 Critère de l'association transparente : Le financement public majoritaire (subventions) ne suffit pas à rendre une association "transparente". Le critère du contrôle de l'organisation et du fonctionnement (présence au conseil d'administration) est déterminant et s'apprécie strictement.
- 📋 Mandat administratif : Pour qu'une personne privée soit regardée comme agissant pour le compte d'une personne publique, la convention doit prévoir explicitement des mécanismes de substitution ou de contrôle direct des actes d'exécution par la collectivité.
- 🎓 Statut du CROS : Bien que soumis au code de la commande publique en tant qu'organisme de droit public (pouvoir adjudicateur), le CROS conserve sa nature de personne privée dans ses relations contractuelles, sauf mandat explicite.
Mots clés
Incompétence, Contrat de droit privé, CROS, Association transparente, Mandat administratif, Subvention publique, Juge judiciaire, Personne morale de droit privé, Commande publique, Contrôle organique.
NB : 🤖 résumé généré par IA